Merci à toutes les personnes qui alimentent ce forum avec des informations de qualité et permettent ainsi aux autres de préparer
au mieux un voyage
Merci à Kola et à son inspirant carnet de voyage qui contribua à construire cette randonnée
Voyage dans le désert un père, sa fille, les pieds dans le sable
Ce chant est pour Toi, Lory...
Jeudi...
Il pleut à
Bruxelles. Il fait froid...
L’oiseau de fer s’élance sur la piste. J’absorbe son énergie grisante pendant que « Tomorrow never knows » pulse dans mes oreilles.
Marrakech nous accueille sous une chaleur estivale.
La journée sera longue avant d’arriver à notre bivouac de cette nuit. Pas le temps de déambuler dans la ville, nous partons vers
Zagora.
Arrêt tardif pour engloutir une omelette berbère. Nous trempons nos pains dans une huile d’argan. Délicieux !
Après plus de huit heures de trajet, nous arrivons enfin à La Fibule du Drâa.
Lahcen Sarti nous fait visiter la fibule, on s’imprègne doucement de l’atmosphère. Devant une vieille carte jaunie de la région où quelques photos aux couleurs
évanouies sont épinglées, nous découvrons notre marche. 6 nuits à dormir à la belle étoile, au plus près de notre terre.
22h30, une 4x4 poussiéreuse nous emporte enfin vers notre première nuit sous les étoiles.
Nous débarquons fatigués, au milieu de nulle part dans un reg perdu. Nous faisons connaissance avec Brahim, notre guide et cuisinier. La tente est montée
Il prépare une tajine pendant que Laurie et moi luttons pour ne pas fermer les yeux. On s’enroule dans nos sacs, il doit être 2 heures du matin..
Vendredi...
Les dromadaires d’abord
Les chant des oiseaux ensuite
Je vais à la rencontre de nos trois dromadaires salut matinal. Youssef, notre chamelier apparaît, on se dit bonjour.
Petite ascension pour goûter le paysage montagne de pierres, silence assourdissant, il m’enveloppe lentement. Je me débarrasse de mes lourdeurs citadines et m’ouvre aux
vibrations de notre terre.
Après un petit déjeuner copieux, nous partons pour notre première marche.
Cœur ouvert, les sens éveillés, mouvements invisibles qui m’entourent, mots légers qui farandolent sur les cailloux goûteux.
La piste se rétrécit. Lambeaux de tissus accrochés à une maigre végétation, scarabées aux démarches saccadées dans le Jbel Abbas.
Arrivée dans un petit canyon à l’ombre, à côté d’une gelta où croassent un nombre impressionnant de crapauds
Rituel qui se répétera avant chaque repas tout au long de notre randonnée Brahim dépose un plateau avec nos verres de thé, des biscuits et des cacahuètes
Le soir, c’est un décor de carte postale qui nous accueille, petit oasis où la verdure se pare de belles couleurs. On entend au loin quelques rires portés par le vent, quelques sons de la derbouka ou alors, je
suis peut-être marabouté et un Djinn malin se joue de moi.
La lumière décline, et peint la colline d’un orange ouaté qui invite à la rêverie.
Le ciel se pare d’étoiles, elles seront les veilleuses de mon corps lourd.
Samedi...
Nous quittons Achkid
Brahim vient vers moi, nous accordons nos pas. Il est guide depuis longtemps, son visage est tanné par la soleil. Il travaille depuis longtemps pour la Fibule.
Papa heureux de trois enfants. J’aime ses silences, nous les laissons grandir entre nous, ils nous enveloppent avec douceur.
Youssef parle beaucoup et s’emporte facilement contre ses dromadaires. Il reste distant tout en nous observant du coin de l’œil. La communication est compliquée, les gestes remplacent les mots.
Les montagnes palpitent leur minéralité, j’écoute et ressent leurs vibrations chantantes
Petit à petit le sentier devient plus sableux, les méchantes pierres pointues se font plus rares. La piste se transforme en erg. Devant nous commencent les dunes. Nouvelle végétation, les Calotropis sortent
de terre, elles indiquent la proximité d’un point d’eau mais attention au latex qui coule de leurs feuilles, il peut rendre aveugle.
Traces de bousiers, traces de lézard, mille signes d’une vie qui grouille dans cet univers pas commode
Pause midi sous un grand Tamaris, ombre bienveillante agrémentée d’une légère brise. Tension qui se relâche.
Les pas s’enlisent parfois dans le sable mou. Le corps peine à trouver son rythme, à harmoniser sa cadence. On glisse.
Laurie souffre, peste sur ce sable glissant, attend avec impatience notre bivouac du soir.
Traces de pneus qui se croisent, se perdent un peu plus loin. On suit presque l’ivresse du chauffeur, sa joie enfantine.
Encore quelques dunes et nous arrivons à l’erg Lmsafi.
Notre takhamt se monte sous un léger vent, on mettra du sable et nos trois Tahaouit pour l’empêcher de s’envoler.
Les dromadaires sont entravés. Mimoun le premier de la caravane, blanc et majestueux sautille vers les épluchures et restes de nos repas.
Chigaga veille sur nous. Demain j’irai gravir cette belle dune à l’aube pour suivre le réveil de Tafoukt
Dimanche....
Montée de Big Mamma
Lumière grise dans une palette de nuances étonnantes
Les couleurs changent rapidement. Le silence m’aspire. Couleurs ocres, fauves d’un nouveau tableau minéral. Fraîcheur du sable sur mes pieds. Le spectacle de ce jour qui se lève est
vivifiant. Brahim en bas prépare le thé. Youssef récupère les dromadaires. Je devine Laurie enfouie dans son sac de couchage. Je m’imprègne de toute cette beauté avant de
redescendre.
Journée harassante entre montée et descentes de dunes, entre sable mou, sable dur. La fatigue m’étourdit, l’ivresse pas toujours. Trouver les passages plus durs.
Soudain, Youssef plonge vers un monticule et attrape un lézard poisson du désert. Son corps est humide, visqueux. Quelle adaptation à son milieu, il se déplace en ondulant très vite son corps pour s’enfoncer dans le sable. Cela ressemble à une nage de poisson.
Je ramasse une belle pierre fossile, polie par le vent et quelques coquillages, témoin d’un passé riche en mers et lacs.
Laurie n’en peut plus, trop de soleil, trop d’efforts, l’impression de ne pas avancer.
Laurie passera l’après-midi sur le dos de Mimoun. On rejoint un nouveau plateau, les dunes s’éloignent.
Lundi...
Arrivée sur un plateau marin.
Nous partons chercher du bois pour le pain de sable.
Le feu ensorcelle, les flammes dansent joyeusement alors que la nuit enveloppe l’espace.
Farine, eau, un peu de levure, Youssef frappe et retourne la pâte pendant de nombreuses minutes.
Les braises sont flamboyantes, écartées. Youssef enterre sa pâte, la recouvre de sable et de braises.
Une petite demi-heure de cuisson et le pain est prêt. Un vrai délice !
On partira rejoindre les bras de Morphée sous les crépitements du bois qui se consume lentement
Mardi...
Lever avec le soleil
On quitte le plateau et sa fourmilière. Un joli festin régalera ses hôtes.
Les dunes s’aplatissent faisant place à de grands plateaux. Mon corps chaloupe agréablement dans ce nouveau décor. Le désert pénètre dans les interstices de mon âme.
Je me sens éclaté aux quatre vents. Je rassemble mes pensées éparses tant bien que mal.
Brahim vient à mon secours et rit de mes troubles. C’est follement gai. A la maison de Brahim, on attend son retour. On attend ses yeux remplis de sourires ensoleillés.
On attend ses plats mijotés dans la cuisine, ses tajines parfumées délicatement enrobées de légumes goûteux. Brahim part souvent pour plusieurs semaines. Je l’envie.
Pause déjeuner sous un magnifique Tamaris qui offre ses feuilles à nos dromadaires. Mimoun se délecte de nos pelures d’orange.
Salade de crudités, tajine aux légumes et sardines.
On repart pour une dernière marche vers M’Hamid, Laurie a pris l’habitude l’après-midi de monter sur Mimoun
Nous croisons les restes d’un dromadaire. Le vent est de plus en plus présent et forme devant nous, de petites tornades.
Au loin, un attelage sans conducteur, une famille qui suit, s’arrête, prise dans les bourrasques de vent.
Dernier bivouac. Je regarde notre Takhamt se dresser, la cuisine toujours établie à gauche, va savoir pourquoi ?
La tajine est déjà sur le feu, notre thé fort et sucré sur le plateau avec les biscuits et les cacahuètes
Un dernier feu brûlera toute la nuit
Mercredi...
Difficile réveil
Je vide mon sac. Des présents pour Brahim et Youssef
Je me sens éveillé, en harmonie avec la Nature, triste de ne pas prolonger encore un peu ces moments
Retour vers la cité, le bruit
Nous passons par
Tamegroute, c’était la route des caravanes qui partaient pour Tombouctou.
Visite d’un atelier de poterie
On repart pour
Zagora où Lahcen nous attend.
Nous aimerions nous poser doucement, Laurie et moi et flâner sans but jusqu’au repas du soir à la Fibule, mais une nouvelle visite nous attends.
Nous irons ce soir chez Lahcen. Il nous présente sa grande famille. Entre le thé, les dattes, les pâtes de fruit et autres sucreries, nous partageons avec gaîté nos différences.
Retour tardif à la Fibule pour le dîner.
Mon corps sableux s’endort sans mal.
Jeudi...
Lever à 4 heures.
Traversée des montagnes sous la pluie, la neige et tous ces travaux qui n’en finissent plus.
Je suis passé par ici il y a 20 ans et le passage de ces cols était déjà toute une histoire !
Laurie dort.
Un léger sourire se dessine sur ses lèvres. Sourire d’ange.
Voyage dans mon espace-temps.
Je suis presque bien...