Il y a quelques années (en juin-juillet-août), j'ai traversé la
Turquie en train depuis
Istambul pour rejoindre Tabriz puis
Téhéran. Je ne me souviens plus du prix mais beaucoup plus abordable qu'en
Europe de l'ouest évidemment. Le train roule très lentement en
Turquie, puis nous laisse sur les rives du lac de Van (le Van Golü) que l'on traverse en bateau. Sur une jetty à proximité de la ville de Van (donc encore en
Turquie), on prend un train iranien et "islamique" (à cause de sa couleur vert foncé, y compris les rideaux, ça tranche avec les voitures blanches immaculée du train turc) - train vec voitures à l'ancienne mais solides et confortables, capitonnées et cosy, un peu à l'image des anciennes voitures soviétiques que l'on voyaient parfois jusque dans les années 1980 à la gare de l'Est ou du Nord à
Paris. On traverse la frontière sans problème (attention pas de possibilité de changer des rials iraniens, or le wagon restaurant, excellent au demeurant, n'acceptait pas les dollars ou les euros, je me suis donc fait payer le petit déjeuner par mes compagnons de voyage, des iraniens très sympas qui avaient passé leurs vacances sur les plages en
Turquie où ils avaient rejoints un oncle réfugié politique en
Norvège). Les douaniers iraniens prennent les passeports tard le soir et les rendent le matin (on s'inquiète car ils ne donnent aucune info). Aucun problème pour traverser cette frontière, si ce n'est l'impression d'entrer dans un autre monde (avec nos clichés sur l'
Iran des mollahs pleins la tête). Ah j'oubliais, vers 22 heures en
Iran, le train s'arrête dans une gare pour un arrêt prière : tout le monde doit descendre, ceux qui le veulent vont à la mosquée voisine, les autres (la majorité) font les 100 pas et papottent sur le quai (environ 30 minutes), c'est très couleur locale (assez bon enfant aussi, les gens ont l'air de prendre cela comme une fatalité).
De
Téhéran, j'ai pris le train jusqu'à Kerman (la ligne de chemin de fer construite par les Allemands au début du XXè s'est arrêtée là). Puis bus Volvo jusqu'à Zahedan (avec plusieurs contrôles par l'armée iranienne, il paraît qu'il y a du trafic d'opium dans la région = rapport à l'Afghanistan très proche). Les moyens de transport en
Iran sont très peu chers (encore moins chers qu'en
Inde, c'est dire. Il est vrai qu'ils ont du pétrole brut, par contre ils importent du pétrole raffiné que le gouvernement subventionne pour avoir la paix sociale).
De Zahédan à la frontière, taxi collectif. A la frontière, un peu plus de 500 mètres à pied dans le no man's land qui sépare les deux postes. Sortie d'
Iran sous le regard indifférent de la marée-chaussée iranienne et arrivée dans l'univers du sous-continent indien (le Pakistan ressemble comme une goutte d'eau à l'
Inde sauf que c'est moins riche et que tous les hommes sont déguisés en musulman), c'est à dire le bordel organisé. En quelques centaines de mètres on change de monde, c'est vraiment étonnant.
Puis taxi collectif (pick-up Toyota) jusqu'à Quetta, capitale du Balouchistan pakistanais à travers 600 km de désert (une route qui disparaît parfois sous le vent de sable, soif, arrêt au milieu de nulle part pour boire un Coca, etc.). Quand on quitte la plaine pour monter sur le plateau plus tempéré de Quetta, on aperçoit des hommes en armes (apparemment pas l'armée pakistanaise), habillés à l'afghane, qui surveillent la plaine perchés sur des nids d'aigles. A Quetta, on voit des trains de voitures U.N. traverser la villes toutes sirènes dehors et à toute vitesse.
De Quetta je voulais rejoindre Islamabad (Rawalpindi) en train mais contrairement à l'
Inde, il faut réserver des semaines à l'avance (le Pakistan n'a pas les moyens d'améliorer ses infra-structures, les trains sont archi-bondés et peu nombreux). Comme j'était pressé (visa de transit) j'ai pris l'avion jusqu'à Rawalpindi puis un taxi collectif sur la superbe autoroute (digne des autoroutes occidentales, jamais vu d'autoroute comme cela en
Inde, construite par les chinois il me semble) jusqu'à Lahore (c'est le début de la Grand Trunk Road qui va jusqu'à
Calcutta). Magnifique paysage du Punjab (très buccolique). La mosquée de Lahore est splendide, plus belle qu'à
Delhi (il est vrai que le gouvernement du Pakistan investit plus dans son entretien que celui de
Delhi).
De Lahore à la Wagha border, taxi. Attente une heure ou deux que la frontière s'ouvre en discutant avec le marchand de bouquins qui achète et vend des guides Lonely planet aux touristes (la meilleure librairie que j'ai vue au Pakistan, il est vrai que je n'y suis pas resté longtemps, une guitoune en bois mais pleine de livres). Ecoute amusée des pakistanais qui me recommandaient d'être prudent en
Inde ("you have to be carefull because
India and Indian people are not very safe", disaient-ils).
Formalités tatillonnes, traversée à pied de la frontière. Panne de courant dans le bâtiment de la douane indienne. Personne d'autre que moi qui traversait (comme dans le film récent Veer Zahra). Sentiment étrange. Puis arrivée en
Inde, en pays connu, donc sentiment de sécurité. Pris le premier cycle rickshaw jusqu'à Attari, puis bus jusqu'à
Amritsar. Ensuite, train classique jusqu'à
Delhi (Shatabdi) où j'avais rendez-vous avec mes amis du
Kérala. Deux semaines dans le Nord de l'
Inde puis "descente" jusqu'à Allepey en train avec mes amis indiens (trois jours de voyage, le Konkan railway n'était pas encore terminé).
Conclusion : un voyage extra-ordinaire que j'hésiterais à refaire dans son intégralité à cause de l'ambiance actuelle au Pakistan (et de la guerre en Afghanistan que font les
USA mais aussi la
France, que diable allons-nous faire dans cette galère, mais c'est un autre sujet...). Pour la
Turquie et l'
Iran pas de problème, au contraire. L'
Iran est d'ailleurs un pays fabuleux où les gens sont beaucoup plus discrets (voire timides) qu'en
Inde mais autant sinon plus accueillants (à condition évidemment de n'être ni états-unien ni britannique car, comme nous, ils sont victimes de la propagande et font un amalgame entre gouvernement des
USA et citoyens des
USA). Au Pakistan, je reviendrai certainement voir Lahore dès que j'en aurai l'occasion mais c'est tout.