Bj Goodine, cette lecture nous concerne tous, moi et d'autres, triste monde que nous sommes.Néanmoins, il ne faut pas culpabiliser, sinon, BOOM!!!Info du 4/01/2010A Delhi, grâce à une association, des SDF ont reçu pour la première fois de leur vie une pièce d’identité. Et c’est leur existence entière qui s’en trouve transformée, explique The Independent.Dans la poussière âcre de la vieille ville de
Delhi, Bhaia Lal Tiwari tire fièrement de sa poche une carte plastifiée qui porte son nom et sa photo. Ce document représente tout pour ce vieux monsieur : après des années d’anonymat, il lui a redonné son identité.
“Cette carte donne beaucoup de force”, confie en souriant M. Tiwari.
“Quand je suis dehors et qu’un policier ou quelqu’un d’autre me demande qui je suis, elle fait son effet. C’est un grand soutien – elle me protège.” A 66 ans, M. Tiwari est tombé très bas. Après s’être disputé avec sa famille voici une vingtaine d’années, il a quitté le Madhya Pradesh, un Etat du
centre de l’Inde, pour venir s’installer à
Delhi. Il a vécu dans la rue pendant longtemps. Il se faisait régulièrement battre par la police et voler ses maigres possessions.
Il y a six ans, M. Tiwari s’est installé dans un refuge situé dans la vieille ville. Là, tous les soirs, des centaines d’ouvriers et de tireurs de pousse-pousse fatigués font la queue pour un matelas et une couverture et, pour 6 roupies [0, 09 euro], s’étendent sur le sol du dortoir. Ce refuge, qui peut abriter jusqu’à 400 personnes parmi les plus nécessiteuses de la ville, est pour elles un point d’ancrage quotidien vital. Mais l’association qui dirige l’établissement,
ActionAid, fait encore davantage. Elle délivre aux résidents une carte d’identité qui porte leur photo, leurs empreintes digitales et les domicilie à l’adresse du refuge.
La valeur de cette carte est difficile à comprendre pour ceux qui n’ont pas à se battre pour rester en vie. Dans cette ville d’au moins 16 millions d’habitants, où le fossé entre riches et pauvres ne cesse de se creuser, il est facile de passer à la trappe. Ici, fait remarquer le romancier Rana Dasgupta,
“l’importance sociale d’un individu est présumée nulle jusqu’à preuve tangible du contraire”.
La société indienne est connue pour la lourdeur de sa bureaucratie, et des millions de pauvres n’ont pas accès aux aides gouvernementales faute de papiers d’identité en bonne et due forme. Nandan Nilekani, l’un des plus grands entrepreneurs du pays, a été chargé de diriger un projet destiné à délivrer une carte d’identité au milliard et quelques de personnes que compte l’
Inde – ce qui devrait prendre au moins trois ans.
“Sans carte d’identité, on n’arrive à rien”, explique Sanjay Kumar, dont l’association
Ashray Adhikar Abhiyan, Campagne pour le droit au logement, entièrement financée par
ActionAid, gère quarante refuges à
Delhi.
“Les SDF n’ont jamais été enregistrés nulle part. Ils n’existent pas et le gouvernement ne peut rien faire pour eux.”
ActionAid fournit un autre service vital : l’ouverture d’un compte en banque pour les résidents du refuge détenteurs d’une carte d’identité. L’
Union Bank of India, un établissement public, a accepté de considérer la carte d’identité délivrée par l’association comme une preuve de domicile. Cinq cents comptes ont déjà été ouverts.
Désormais, un responsable de la banque se rend plusieurs fois par semaine au refuge avec un scanner à empreintes digitales : il vérifie les empreintes des personnes qui souhaitent faire un dépôt, puis collecte les petites sommes d’argent qui leur appartiennent, et les verse ensuite sur le compte des intéressés. Les résidents du refuge peuvent également effectuer des retraits.
Pour eux, c’est un changement révolutionnaire. Ces gens malmenés par la vie n’ont au moins plus à s’inquiéter de trouver une cachette pour leurs roupies graisseuses durement gagnées. La carte d’identité et le compte en banque leur donnent quelque chose de plus – la dignité. Abdul Hussain est l’un de ceux qui ont ouvert un compte. Ce quadragénaire a l’un des emplois les plus moyenâgeux de cette ville épuisante. Dès 6 heures du matin, il transporte des marchandises avec une charrette à bras sur un marché voisin. Les bons jours, il gagne ainsi 200 roupies [3 euros].
“Cette carte est d’une grande aide pour nous”, confie M. Hussain, qui est arrivé il y a dix-huit ans de
Hyderabad, dans le Sud.
“Auparavant, je déposais mon argent chez un petit prêteur. Mais ça, ça nous permet de faire des économies. Cela nous donne une impression de sécurité.”
M. Tiwari, qui gagne 2 000 roupies [30 euros] par mois dans un atelier de réparation électrique, a également pu ouvrir un compte en banque grâce à sa précieuse carte d’identité.
“Je suis né en Inde et j’ai le droit de vivre comme un citoyen normal. Avant, j’étais toujours en train de me battre contre le système, déclare-t-il.
Aujourd’hui j’ai l’impression d’être soutenu. Si je n’avais pas cette carte, je n’aurais rien. Je n’aurais pas d’identité.”
Selon les estimations d’
ActionAid,
Delhi compte au moins 170 000 SDF. Ils dorment sur les trottoirs, dans les temples ou les terrains vagues et nombre d’entre eux meurent de froid en décembre et en janvier. L’exode rural se poursuivant, les gens ne cessent d’affluer dans les villes dans l’espoir de recevoir leur part de la fameuse croissance économique et le nombre de ceux qui n’ont pas de domicile va continuer d’exploser.