Fabricia · 19 septembre 2005 à 8:48 · 46 photos 28 messages · 10 participants · 20 847 affichages | | | 19 septembre 2005 à 8:48 · Modifié le 5 avr. 2007 à 11:43 Turquie - Istanbul et rêveries ottomanes Message 1 de 28 · Page 1 de 2 · 17 566 affichages · Partager A la fois lointaine et proche, objet de mes nombreuses lectures et si riche en vestiges historiques, la Turquie* est, sauf erreur, le seul pays qui soit situé sur deux continents, l'Europe et l'Asie.
Istanbul est une ville fascinante à laquelle j'ai consacré deux visites, car la première fut si brève que j'avais eu la nette impression d'avoir manqué ce rendez-vous. Un nouveau séjour est décidé quelques mois plus tard. J'avais tant rêvé de cette cité mythique, ancienne Byzance puis Constantinople : je voulais revivre ses mystères en flânant lentement au hasard des vieux quartiers où s'était déroulée l'histoire de l'empire ottoman.
Pierre Loti, un de mes écrivains préférés, éprouvait une grande passion pour Istanbul et a raconté ses nombreux séjours dans cette ville au début du 20ème siècle. Je sais que je ne retrouverai pas le charme mystérieux de la Turquie d'antan et qu'il faudra beaucoup d'imagination pour se souvenir de ce que fut la toute puissance des sultans...
Un vol Nice- Istanbul direct nous dépose un après-midi d'octobre sur le tarmac stambouliote. Notre hôtel est situé dans le centre historique de la ville, à l'écart du grand boulevard central sillonné par un tramway bruyant, surchargé de voyageurs à toute heure du jour. A la nuit tombée, nous traversons le pont de Galata qui enjambe la Corne d'or pour admirer la vue sur les minarets illuminés des mille mosquées qui se reflètent comme des bougies géantes dans les eaux du détroit.
Dès les premiers rayons du soleil, nous grimpons dans le tramway déjà comble : de nombreux turcs qui travaillent dans la zone touristique et dans le Grand Bazar migrent ainsi chaque jour de l'ouest vers l'est de la ville, pour revenir chaque soir chez eux dans le sens inverse. Serrés comme des parisiens dans le métro matinal, nous inaugurons ce nouveau moyen de transport qui était encore en chantier lors de notre précédente visite.
Deux tourelles aux toits pointus entourent la porte principale du palais de Topkapi, ornée de créneaux d'inspiration médiévale. Au sommet d'une flèche, le drapeau turc, fond rouge avec croissant de lune étoilé, se déploie sur le ciel bleu. De part et d'autre du portail, deux niches sont creusées dans la muraille : c'est là qu'étaient exposées les têtes coupées des rebelles qui avaient eu le mauvais goût d'affronter le sultan. Il faut arriver très tôt le matin, avant l'ouverture du palais, pour entrer les premiers dans le harem avant l'invasion des foules. Lorsqu'on pénètre enfin dans ces lieux déserts et silencieux, des ombres impalpables flottent dans le sombre corridor où une faible lueur perce à travers une étroite lucarne. Les battants de la porte se sont refermés. Prison dorée pour l'éternité : dans ce harem d'autrefois, les captives qu'on amenait ici savaient qu'elles n'en ressortiraient qu'après leur mort. Pour égayer un peu cette vie de recluses, quelques tableaux peints sur les murs représentent des paysages fleuris au détour des couloirs. Les fêtes se déroulaient dans l'immense salle du Diwan, somptueusement décorée de mosaïques, dais précieux sous lequel s'asseyait le souverain, tapis de soie, candélabres d'argent ciselés, et sur les galeries surélevées, dominant l'assemblée masculine, des musiciens accompagnaient de leurs instruments des danseuses choisies pour leur beauté. Dissimulées derrière des moucharabiehs, les favorites invisibles contemplaient l'assistance qui ne devait jamais lever les yeux vers elles. Un dédale de galeries mène aux chambres des concubines, minuscules pièces où le soleil ne pénétrait jamais. Glacial et terrifiant destin pour ces femmes qui n'étaient là que pour le plaisir fugace d'un impitoyable despote.
Nous sommes les deux seuls visiteurs dans cet immense palais, que nous parcourons lentement, goûtant le charme et le silence. Le gentil gardien qui nous accompagne referme les portes de chaque pièce après nous avoir laissé tout le temps de rêver et de prendre plusieurs photos...
A la sortie de cette terrible prison, on retrouve la cour principale avec ses jardins et le musée qui renferme des trophées : céramiques et porcelaines de Chine, céladons, lourds bijoux rehaussés d'énormes diamants, poignard serti d'émeraudes, armes et lourds caftans de soies brodées de motifs d'or et d'argent, manuscrits et calligraphies délicates... et le plus précieux de tous ces objets, un poil de la barbe du prophète dans une vitrine protégée jour et nuit par des gardiens vigilants... Pour reprendre goût à la vie, nous dégustons un repas de poissons sur une place ensoleillée, à Kumkapi, au bord de la mer Marmara, entourés de chats affamés qui se précipitent, toutes griffes dehors, sur les morceaux qu'on leur offre. Des myriades de bateaux venant du monde entier naviguent sur les eaux du Bosphore dans un mouvement ininterrompu.
Toute rose, la basilique Aya Sofia ( Sainte Sophie) resplendit au milieu d'un parc verdoyant. De dimensions gigantesques, elle a été convertie en mosquée puis en musée. A l'intérieur, la double présence du catholicisme et de l'islam cohabite harmonieusement sous l'aspect de médaillons gravés d'arabesques et d'images pieuses peintes sur les murs des galeries supérieures. L' église St-Sauveur-in-Chora, très ancienne chapelle chrétienne, a été transformée elle aussi en mosquée, qui porte maintenant le nom de Karyié-Camii. Ses magnifiques fresques byzantines sont considérées comme les plus belles du monde. Dans les petites rues qui entourent l'hôtel, de nombreux forains exposent leurs marchandises étalées sur les trottoirs : tissus, tricots, quincaillerie, outils... Et le soir venu, ils remballent tout dans des bâches ficelées qu'ils surveillent toute la nuit, dormant sur place blottis dans des amoncellements de couvertures.
* Il faut lire : "Istanbul (et non la Turquie) est, sauf erreur, une des rares villes situées sur deux continents." Images attachées: | | Chère Fabricia,
Je t'avais promis d'etre ton guide si tes pas te menaient de nouveau vers Istanbul... c'était bien prétentieux de ma part.... Y a t il une suite... Vas tu nous emmener nous perdre dans le dédale du grand bazaar? déambuler autour de la charmante mosquée d' Ortakoy au pied du premier pont? Mettrons nous un pied en Asie? a Usküdar ou Kadikoy?
Aujourd'hui, malheureusement le harem de Topkapi ne se visite qu en groupe... de 60 personnes, avec un guide plus ou moins anglophone ou un audio guide obligatoire... Départ toutes les demi heures, et a cause des guides des "City Tours", on doit souvent se contenter d une visite au milieu de l apres midi malgré une arrivée matinale... Quand on traine un peu, pour prendre des photos, apprécier le silence d une piece, y chercher une ombre ou gouter au bruit de la pluie qui frappe violemment les fenetres peintes comme le we dernier, on est gentiment sermonné par un agent de sécurité qui ferme la marche... La faute a qui? A des vandales qui, depuis que Topkapi se visite, ont arraché ça et la qui un carreau de faience d'une mosaique, qui un bout de nacre des fabuleux meubles en bois, portes ou volets interieurs... Un bien beau souvenir a ramener chez soi et qui sera sans doute bien mis en valeur sur une étagère parisienne... | | Ca fait rêver et c'est bien raconté, mais je voudrais juste apporter un correctif en ce qui concerne les pays situés sur deux continents. On s'était amusé à les recenser avec un ami, et on en a dénombré une bonne vingtaine.
Par continent, il faut entendre Amérique du Nord, Amérique du Sud, Australie-Pacifique, Terres Australes, Afrique, Europe et Asie (l'Antarctique est exclu car les souverainetés prononcées par certains ne sont pas reconnues).
Outre la Turquie et la Russie qui sont les plus évidents, il y a aussi l' Egypte qui déborde en Asie, Panama qui est à cheval sur les deux amériques, le Kazakhstan qui déborde en Europe, la Géorgie dont la frontière nord ne coïncide pas avec la ligne de crêtes du Caucase et la fait donc déborder en Europe... l' Azerbaidjan qui est il me semble dans la même situation, et puis et puis, tous ces pays ayant des possessions outre mer:
France, GB, Espagne, Portugal (quoi que non, je crois que le Portugal n'en a plus sur les autres continents), Pays-Bas, Norvège, Danemark (le Groenland, c'est pas en Europe), Brésil (les iles au Milieu de l'Atlantique sont partiellement africaines)...
De nombreuses iles grecques sont davantages asiatiques qu'européennes, et l'ile italienne de Pantelleria est plus africaine qu'européenne.
Creusons encore un peu, il y a bien l' Afrique du Sud, l' Australie et la Nlle Zélande qui possèdent des terres australes aussi.
Et puis le Yemen qui possède l'ile africaine de Socotra, ou l'Erythrée qui possède des iles dans la Mer Rouge, plus proches de l'Asie que de l'Afrique.
Et l' Islande? Quel continent? Si on considère que l'île est sortie du rift médio-atlantique, il faut donc en déduire qu'elle est à cheval sur les deux plaques continentales et donc est... euro-américaine.
L' Indonésie est asiatico-océanienne, les USA sont américano-océaniens, de même que le Chili et l' Equateur. L'ile mexicaine non loin de Cliperton serait plutôt océanienne qu'américaine, et certaines iles colombiennes seraient plutôt nord-américaines qu'autre chose. Quant aux Philippines et à ses iles innombrables, comment le classer?
Je dois encore en oublier quelques uns et n'ai pas d'atlas à portée de la main pour me rafraichir la mémoire.
Désolé d'avoir pollué ton fil | | Tu n'as pas pollué mon fil, loin de là... Merci pour toutes ces précisions. J'aurais dû écrire " Istanbul, la seule ville située sur deux continents"... Peux-tu confirmer cette dernière phrase ? | | Sans atlas à portée de la main, j'aurais du mal à répondre avec précision, mais j'aurais tendance à dire qu'Itambul n'est pas la seule.
Je ne sais pas s'il y a une ville jumelle située de part et d'autres des Dardanelles. Peut-être pas.
Mais en Egypte, il me semble que Port Said et et Suez, étant situées à chaque extrémité du canal, devraient normalement avoir chacune un bout en Afrique et un bout en Asie.
Et tout le long du fleuve Oural (marquant la frontière entre l'Europe et l'Asie), il y a sans doute tout un tas de villes situées de part et d'autre du fleuve, aussi bien en Russie qu'au Kazakhstan.
Au Panama, si on considère que le canal marque la séparation entre les deux continents, il doit bien avoir des villes bi-continentales. Y a forcément un port de chaque côté, et qui dit port, dit ville.
| | Merci, Yangguizi, de cette réponse... Alors, je vais corriger mon texte initial ! | | Voilà une bien agréable promenade, dépaysante, documentée et joliment racontée... Comme toutes celles que tu nous fais partager chère Fabricia ! Le plus étrange c'est que tu réussis à me faire penser que je pourrais aller un jour ou l'autre dans ces contrées qui ne m'attiraient pas jusqu'alors... Enfin, j'y pense, je n'y suis pas encore... , sauf en te lisant... Merci beaucoup. Dolma | | Quelle bonne surprise chère Fabricia !
Merci pour cette belle promenade dans Istanbul que nous aimons beaucoup... Nous avons eu la chance, comme toi et Bernard, hors saison, de pouvoir longuement flâner à pied dans tant de beaux endroits de cette ville. Nous avions pu faire des visites tranquilles et sans la foule dans les palais et les mosquées. Livre à la main, nous avions cherché, trouvé parfois et suivi les traces de Pierre Loti et de sa belle Azyadé (je t'avais déjà dit mon engouement pour tout ce qu'a écrit ce Monsieur...)
Tu ne vas pas nous croire... mais on s'était logés à l'hôtel Azyadé (4*), rue "Pyerloti" (oui ! ça s'écrit comme ça !), dans le centre ( Sultanahmet). Bah... quand on aime, il faut pas faire les choses à moitié, non ?
Où vas-tu nous emmener maintenant ? Voir les faïences de rêve qui décorent cette perle rare qu'est la petite mosquée de Rustem Pacha ? Irons-nous au palais de Dolma Bahce sur la rive du Bosphore, prendrons-nous le "vapour" pour traverser vers la rive asiatique au milieu des sirènes et des bruits de moteurs... ?
à Topkapi,... dans l'immense salle du Diwan, somptueusement décorée de mosaïques, dais précieux sous lequel s'asseyait le souverain,
Le Diwan... un lieu fascinant d'où s'exercait le pouvoir suprême sur l'immense empire ottoman. Comme tu le sais, c'est de là que vient le mot français "divan" (on voit bien sur ta photo le divan où siégeait le sultan)... Mais "Diwan" a donné aussi le mot français "douane"... car par extension, au-delà de la pièce d'où partait le pouvoir, le Diwan désignait l'administration de l'empire, dont le souci principal était le contrôle des frontières et du commerce international...
Bon, passe devant, on te suit... Ahhh ! attends : juste une pause pour déguster un petit baklava !
Chris. | | Teshekur ederim Fabricia pour cette escapade stanbouliote...
Comme c'est bien écrit comme d'habitude... je sens l'odeur des sardines grillées sur le bord du Bosphore...
Oui, Chris a raison, allons vite découvrir la petite Rustempasha Camii et la mosquée bleue.....
merci Chris pour la précision... on retrouve le Diwan, également souvent dans les monuments indiens... | | Merci pour ton récit Fabricia qui me replonge dans mon merveilleux passage à Istanbul. J'en suis revenue avant hier soir et j'ai encore la tête là-bas.
Il me reste encore quelques baklava que j'ai ramené, pour prolonger le plaisir.
Catherine | | À: Fabricia · 22 septembre 2005 à 16:04 · Modifié le 4 juil. 2007 à 13:16 Re: Turquie - Istanbul et rêveries ottomanes Message 11 de 28 · Page 1 de 2 · 17 311 affichages · Partager Istanbul - 2Dîner à l'hôtel, ce soir, et déjà couchés avec l'espoir de s'endormir dans le calme... mais un haut-parleur gueule une musique d'ambiance à tous les étages, rythmée par des coups de marteau qui résonnent dans l'immeuble voisin. Renseignements pris à la réception, c'est un ouvrier qui vient de s'atteler à son deuxième boulot : la réfection d'un appartement en nocturne, pour arrondir ses fins de mois... Pour l'ambiance musicale, on obtient que cela s'arrête... mais c'est un cruel dilemme envers le maçon laborieux ! Une délicate mission pour prier ce dernier d'abréger autant que possible son entreprise de démolition. Ce qu'il accepte de bonne grâce, car il a un autre chantier plus loin, dans un immeuble isolé.
Chacune de nos journées commence par un solide petit déjeuner sous le regard bleu acier du père de la Turquie moderne, je veux parler de Mustafa Kemal Atatürk, dont le portrait figure dans tous les lieux publics du pays. Maintenant encore, il est interdit d'énoncer une critique quelconque à son égard, sous peine d'une punition exemplaire. C'est lui qui a construit les bases de la nation turque, devenue république le 29 octobre 1923, après avoir aboli le sultanat et imposé la laïcité dans l'ancien empire musulman.
Un tour très matinal sur la place Beyazit, parmi les vendeurs d'un étrange marché où l'on trouve une multitude d'objets. Deux grands gaillards blonds ont posé sur des bâches à même le sol des appareils optiques de métal gris. Ce sont des russes venus vendre du matériel militaire de leur pays, entre autres des jumelles à infra-rouge. B renonce à les acheter, se méfiant à juste titre des difficultés rencontrées lors du passage en douane pour retourner en France.
Nous arrivons à la mosquée bleue ( Sultanahmet camii), imposante et sobre avec sa pierre grise et ses coupoles encadrées de hauts minarets. Avant d'entrer, il faut se déchausser et soulever un lourd rideau qui masque la porte centrale. A l'intérieur, des milliers de céramiques d'un bleu pur épousent murs, arceaux et piliers dans une harmonie parfaite, illuminées par les rayons du soleil qui pénètrent par les petites lucarnes en ogive. D'immenses tapis aux savants motifs recouvrent les dalles du sol. Des lustres ornés de centaines de tulipes en verre multicolore se reflètent en mosaïques diffuses dans les galeries latérales. Quelques fidèles, les hommes au centre et les femmes sur les côtés, sont venus se recueillir un instant.
Tout autour de cette mosquée, c'est une cité marchande avec des magasins de grand luxe : tapis, bijoux, vaisselle et objets d'artisanat.
La recherche d'une Küçük Ayasofia Camii (" petite Sainte-Sophie"), signalée dans un de nos guides, nous conduit dans un quartier ancien au milieu de maisons en bois, bordant des ruelles en pente, sur une colline qui domine la mer de Marmara. On aperçoit enfin cette mosquée en très piteux état, enfermée dans une cour effondrée où coule un égout nauséabond. L'endroit est devenu inaccessible. Il faut renoncer à aller plus loin et rebrousser chemin vers les grandes artères encombrées par une circulation automobile infernale. Les traverser relève d'un pari sur la vie. Inch Allah !
La Yerebatan Sarnici ( Citerne basilique) se trouve dans le quartier de Sultanahmet : une simple maisonnette en bois indique l'entrée de cette curiosité. Il faut descendre un étroit escalier de pierre pour se trouver au fond d'une immense citerne souterraine, avec de hautes colonnes qui soutiennent la voûte. Une légère musique accompagne les frémissements de l'eau où se reflète un éclairage discret qui participe au charme étrange de cet édifice byzantin.
Trois musées archéologiques sont proches du parc de Gülhane. D'abord, le musée d'Antiquités grecques, romaines et byzantines, puis le musée de l'Ancien Orient (Mésopotamie, Egypte, Assyrie, Babylone...) et pour finir, le musée des Céramiques. La façade de celui-ci est recouverte de carreaux en camaïeu bleu et vert, et à l'intérieur on peut admirer la beauté des célèbres céramiques turques, dont les fameuses tulipes si chères aux sultans, d'une valeur inestimable.
En sortant de ces trois musées, nous remontons vers les remparts de Topkapi : l'église Sainte Irène servait d'arsenal aux janissaires, puis est devenue mosquée elle aussi, pour être maintenant consacrée aux expositions de peintures ainsi qu'à des concerts de musique classique.
Après ce bain culturel, un déjeuner au restaurant Vitamin, Divan Yolu, où on se régale de plats exquis et aussi légers que l'addition... Vite dans le tramway : prochaine visite, le Büyük Valide Han, ancien caravansérail au nord du Grand Bazaar. C'est un enchevêtrement de ruelles et dédales pour arriver devant la grande cour. Deux escaliers mènent à une vaste galerie encombrée de cartons et d'énormes ballots, dans le vacarme assourdissant des ateliers de tissage en plein travail. Un jeune homme vient à notre rencontre et nous guide vers le dernier niveau, qui ouvre sur les toits-coupoles d'où l'on a une vue panoramique sur toute la ville... Vertigineux et splendide spectacle. De là, on peut faire le point et retrouver les différents quartiers d' Istanbul. Refaisant le chemin inverse, nous arrivons au Misr Bazaar ( Bazar Egyptien) à travers des rues grouillantes de monde. Et voici les "hamallar", portefaix dont parlait Pierre Loti, leurs descendants, presque un siècle plus tard, transportent toujours de lourds rouleaux de tissu sur leur dos à travers la foule. Dans le bazar, les échoppes des marchands d'épices offrent des pyramides de poudres qui dégagent un vigoureux parfum.
A notre grande déception, la si jolie Rüstem Pacha Camii est toujours en restauration, depuis des années... six mois auparavant déjà, nous n'avions pas pu la visiter. La traversée de la Corne d'Or se fait à pied sur le pont neuf qui remplace désormais l'ancien sous-pont de bois où de nombreux pêcheurs venaient lancer leurs lignes dans l'eau du fleuve. De la rive opposée, la vue est superbe sur le vieil Istanbul et ses innombrables dômes et minarets. Images attachées: | | À: Kzt · 22 septembre 2005 à 16:20 Re: Turquie - Istanbul et rêveries ottomanes Message 12 de 28 · Page 1 de 2 · 17 305 affichages · Partager Merci à :
Kathecat Babiroussa Yangguizi Dolma Chris51 Phil64
pour avoir pris le temps de lire ces souvenirs d' Istanbul, que je prends grand plaisir à partager avec vous... | | Je viens donc de continuer ma promenade-découverte... Je ne connais pas, donc ton récit ne me "rappelle" rien, je me contente de me laisser guider par ton écriture et c'est un plaisir à chaque fois renouvelé.
Et j'ajoute que je ne "prend pas le temps de te lire", j'aime te lire, tout simplement, il n'est donc pas nécessaire de me remercier pour cela !
A bientôt pour la suite.
Dolma | |
* Il faut lire : "Istanbul (et non la Turquie) est, sauf erreur, une des rares villes situées sur deux continents."
Namasté Fabricia,
Effectivement Istanbul est la seule ville située sur deux continents.
Je te remercie pour ces quelques lignes. Istanbul est la ville magique par excellence avec ses influences des pays voisins et en passant par l'éternelle opposition entre Orient et Occident. Tout est opposition....
j'imprime tout car j'ai de la route à faire et je relis tranquilement dans mon train.....
oh! que j'aime te lire!!! | | À: Kaou28 · 26 septembre 2005 à 12:01 · Modifié le 31 déc. 2005 à 17:19 Re: Turquie - Istanbul et rêveries ottomanes Message 15 de 28 · Page 1 de 2 · 17 233 affichages · Partager Sur les traces de Pierre Loti... Promenade en suivant les pas de l'auteur d'Aziyadé qui raconta l'histoire d'amour touchante d'un lieutenant de marine avec une jeune femme turque à la fin du 19ème siècle... : "... le va-et-vient sur la Corne d'or avait une activité inusitée ; à la tombée du jour, des milliers de caïques abordaient à l'échelle d'Eyoub, ramenant dans leurs quartiers tranquilles les Turcs que leurs affaires avaient appelés dans les centres populeux de Constantinople, à Galata ou au grand bazar..."
En cette journée d'octobre 1992, il règne toujours la même animation dans le quartier d'Eyoub, mais les jolis bateaux à rames ont été délaissés pour des canots à moteur et des vapürs qui transportent les nombreux travailleurs d'une rive à l'autre de la Corne d'or, dans un bourdonnement incessant. Dans les rues, même frénésie de véhicules qui roulent dans toutes les directions, dégageant un nuage de vapeurs polluantes qui stagne sur la ville.
Eyoub : nous voici dans un des secteurs intégristes d' Istanbul. A peine arrivés devant la mosquée, une femme en abaya noire nous accoste en prononçant quelques mots dont nous saisissons le sens : bien que nous ayons ôté nos chaussures, l'usage voudrait qu'on sacrifie aux habituelles ablutions avant d'entrer dans le coeur de l'édifice afin d'y prier son dieu... Passant outre sous son regard réprobateur, nous jetons un coup d'oeil rapide vers l'intérieur, sombre et empreint d'une ambiance peu encline à la rêverie. Autour de cette mosquée, une belle cour pavée avec sa fontaine rituelle où de nombreux pigeons viennent picorer les graines lancées par les promeneurs. Quelques boutiques de souvenirs pieux vendent chapelets, amulettes et talismans ornés d'arabesques. Une femme assise sur un pliant surveille son fonds de commerce, un pèse-personne qui, pour quelques centimes, vous avertira de la nécessité d'entamer un régime pour perdre quelques kilos...
Une route étroite monte le long des cimetières édifiés sur la colline jusqu'au fameux Pyer Loti Cafe, où la légende voudrait que le grand voyageur soit souvent venu. L'histoire est belle, le panorama qu'on peut admirer de la terrasse est grandiose et les bicoques de bois ont disparu pour laisser place à un joli chalet arborant fièrement le nom du célèbre écrivain. C'est le rendez-vous des nostalgiques de la Turquie d'autrefois, portraits et gravures aux murs, banquettes de velours et guéridons accueillent les visiteurs autour d'un chaï parfumé. Parmi les stèles des cimetières qui s'élèvent de chaque côté du chemin, on a cherché en vain celle d'Aziyadé : Pierre Loti l'a rapportée à Rochefort, en Vendée, dans sa maison de famille devenue un étonnant musée consacré à ses souvenirs de voyages autour du globe.
Sur la place de la mosquée du sultan Selim, le marché aux oiseaux, grande passion des orientaux, est un kaléidoscope de couleurs vivantes qui s'agitent dans un concert un peu désaccordé. On retrouve ce même engouement dans de nombreux pays asiatiques, où ces bestioles sont considérées comme des porte-bonheur. L'étrange citerne d'Aspar, énorme excavation que les Byzantins nommaient le Jardin sec, sert aujourd'hui de parc de stationnement automobile. Le muezzin appelle ses fidèles à l'une des cinq prières du jour quand on arrive enfin à Sultan Selim Camii : il n'est pas question de la visiter et on se contente d'une promenade dans les jardins avec vue sur la Corne d'or.
Le Grand Bazaar est un immense souk couvert où se dirige une foule de badauds attirés par la multitude de marchandises qu'on peut y trouver. Dans un grand tourbillon de senteurs étranges, on circule au milieu des étalages d'épices, ingrédients variés, ustensiles, cuivres, tissus et linges brodés, maroquinerie, vaisselle, verreries, lustres, objets usuels et antiquités... Les marchands interpellent les passants, promettant des rabais substantiels et offrent un çay (chaï) à ceux qui se laissent convaincre de s'asseoir dans la minuscule échoppe d'où il sera très difficile de ressortir les mains vides... Par deux fois déjà nous sommes venus là, avec l'intention d'acheter le samovar de mes rêves. Parmi des dizaines, voici enfin celui qui me plaît : le cuivre d'une belle couleur dorée est un peu cabossé et les parois intérieures noircies de charbon prouvent qu'il a été souvent utilisé dans une vie antérieure. Il porte des poinçons et des inscriptions gravées en cyrillique, attestant qu'il pourrait avoir été fabriqué chez les Bulgares, ou en Crimée ou dans certains territoires caucasiens, qui appartenaient autrefois à l'empire ottoman. Comme je suis séduite, l'achat est vite conclu et le commerçant me donne, en prime, une modeste théière qui s'ennuyait dans un coin de la boutique ! Nous déjeunons au Havuzlu restaurant, au coeur du bazaar, de böreks délicieux avec fraîche salade, et deux cafés -turcs, of course- servis dans ces pots de cuivre à longue anse si typiques.
L'Université que nous voulions visiter est fermée car la Turquie est en fête : c'est le 69ème anniversaire de la République. Un immense marché se tient sur la place proche des bâtiments universitaires, la foule désoeuvrée déambule devant un bric-à- brac d'objets hétéroclites, un vrai marché aux puces pour distraire les curieux. Juste derrière l'esplanade, une galerie couverte est entièrement occupée par les marchands de livres et matériel scolaire destinés aux étudiants et aux amateurs de lectures. Dans un vacarme assourdissant, des postes de radio retransmettent un match de football dont les résultats sont accompagnés par les hurlements des supporters locaux... Dans les librairies, on trouve la littérature classique au programme des facultés dont beaucoup d'oeuvres d'écrivains français, traduits ou non en turc, tels que Victor Hugo, Emile Zola, Guy de Maupassant, qui figurent en bonne place. Plusieurs rayons sont consacrés à des textes religieux arabes et persans. Et toujours l'inévitable portrait d'Atatürk accroché dans chaque boutique... Images attachées: | | A notre grande déception, la si jolie Rüstem Pacha Camii est toujours en restauration, depuis des années... six mois auparavant déjà, nous n'avions pas pu la visiter.
Et bien cela m a donné envie, et la restauration de ce petit trésor est enfin achevée semble t il !! Avec ta permission, voici quelques photos... Perdue, presque cachée au coeur d un bazaar qui regorgent des choses les plus improbables : chaussures (usagées) a prix défiant toute concurrence, paniers tressés et aubergines séchées, tournevis et balais... attention a ne pas louper les quelques marches dissimulées entre deux amas de marchandises en tous genre, huile pour lampes ou medailles d Atatürk (le fameux !!)
Istanbul etait belle et orageuse ce week end, Rüstem Pasa presque vide... Merci de m avoir mis l eau a la bouche... Rüstem Pasa, la discrète et secrète, est bien plus émouvante que sa cousine sultanahmet !!
Babiroussa Images attachées: | | Ces photos sont magnifiques, chère Babiroussa ! Merci pour la visite en images de cette ravissante Rüstem Pacha Camii et ses mosaïques si belles : je comprends enfin pourquoi la restauration a duré si longtemps... | | Et la visite si agréablement guidée continue... Merci à toi Fabricia pour les commentaires et à Babiroussa pour les photos ...
A bientôt pour un autre quartier ?
Dolma | | À: Dolma · 30 septembre 2005 à 8:17 Re: Turquie - Istanbul et rêveries ottomanes Message 19 de 28 · Page 1 de 2 · 17 101 affichages · Partager Rencontres à Istanbul -Nous avons tant marché à travers la ville que nous n'avons plus envie de nous éloigner de l'hôtel, ce soir. Le Süreya Lokantasi se trouve à deux pas. La carte des plats n'est pas très originale, brochettes, goulash aux légumes-pays, très cuit, parfumé d'épices, c'est très bon et pas cher ! Le serveur surveille attentivement les assiettes des clients, auxquelles il faut parfois se cramponner pour qu'il ne les retire pas avant qu'on ait tout mangé.
Trois personnes se sont assises à la table voisine. Une famille qui vient de loin, aux cheveux noir jais et le teint cuivré. Une énorme moustache orne le visage du père revêtu d'un blouson doublé de fourrure, la maman porte un fichu bariolé, des couches de jupons et des vestes matelassées de couleurs vives comme ces poupées gigognes russes en bois peint. Le fils, d'une vingtaine d'années, est coiffé d'une toque d'astrakan et chaussé de bottes en cuir. Ils mangent rapidement une soupe épaisse, sans échanger une parole. Nous questionnons le serveur après leur départ : ils sont venus de Roumanie, dans l'espoir de trouver du travail à Istanbul...
La Süleymaniye Camii (mosquée de Soliman-le Magnifique) est au programme de notre journée. Nous marchons sur la grande avenue déserte, on approche de l'édifice dont les dômes et les minarets se profilent à l'horizon. Deux jeunes turcs viennent à notre rencontre sur le trottoir, B. est accosté par l'un des garçons qui le serre de près et agite sous ses yeux une carte tout en faisant un discours pressant. Mon compagnon, d'abord intrigué, finit par le repousser doucement et me rejoint devant la contemplation de l'immense mosquée du sultan. Assis sur une pelouse, un petit vendeur de savonnettes nous sourit, B. se laisse tenter et quand il veut prendre un peu de monnaie dans sa sacoche, il s'aperçoit qu'elle est grande ouverte et que le portefeuille n'y est plus... Il réalise alors qu'il vient d'être dévalisé en quelques secondes de tous ses documents importants (passeport, carte d'identité, permis de conduire, carte grise, carte bleue...).
La promenade tourne court ! Un retour précipité à l'hôtel pour téléphoner en France à tous les vents afin de signaler la disparition de ces papiers sans lesquels un touriste devient un clandestin ! Il faut aller déclarer le vol au bureau Beyazit Polis Karakolu, mais ça se corse car le commissaire ne s'exprime qu'en turc, un interprète devient indispensable. Youssef, employé de l'hôtel, a été pressenti et nous voici de nouveau en face du policier-chef qui, après avoir refermé son journal et rangé quelques papiers, consent enfin à écouter notre mésaventure, racontée en anglais à l'interprète qui traduit en turc. Tout cela prend un certain temps, car le policier tape à deux doigts sur la vieille machine à écrire un rapport détaillé en plusieurs exemplaires. Un grand merci et un bon backchich à Youssef, qui nous a tirés d'un mauvais pas. Mais les démarches ne sont pas terminées, car l'absence de passeport doit être compensée par une autorisation dûment accordée par le consulat de France, fermé en ce jour de fête nationale.
Un déjeuner dans un petit restaurant et revoici la belle Mosquée de Soliman, que nous avions abandonnée précipitamment ce matin. Chef d'oeuvre du grand architecte Sinan, inhumé au coeur de l'édifice depuis 1588, elle est aussi majestueuse que son sultan, qui repose près de son épouse bien-aimée, la belle Roxelane. Dans le beau mausolée de forme hexagonale, édifié juste à côté de la mosquée, les imposants catafalques des époux sont recouverts de précieux velours vert émeraude, couleur de l'Islam, entourés de lourds chandeliers de bronze...
Le lendemain, dès les premières heures de la matinée, nous allons dans le quartier de Taksim, rue Istikläl Caddesi, siège du consulat. C'est la partie occidentalisée d' Istanbul avec ses immeubles neufs, les grands hôtels, le lycée Galatasaray (dit lycée français, car l'enseignement des sciences et de la philosophie y est donné dans la langue de Voltaire !) et des magasins élégants... C'est une rue piétonne malgré la ligne de tramway qui rejoint Taksim au Tünel, métro à crémaillère qui redescend vers la Corne d'or. Autorisée également aux voitures de police. La grille du Consulat français est encore fermée mais, d'après le planton de service, devrait ouvrir dans 45 minutes. Le temps nous paraît bien long. On appelle le numéro de téléphone marqué sur la plaque, et par chance, une voix française nous répond enfin : le consul est parti pour le week-end, mais son adjoint accepte de venir à notre secours. L'homme providentiel arrive au bout d'un certain temps et nous enmmène dans son bureau, au fond de la grande cour pavée. Voici l'imprimé pour un laisser-passer provisoire, tamponné et signé pour B. qui retrouve une précieuse identité lui permettant de retourner légalement en France à la fin du séjour.
Nous conversons avec notre sauveur qui a choisi la carrière consulaire par goût des voyages, après avoir passé des concours internes dans la police. Il se prépare à quitter son poste actuel pour une nouvelle affectation au Chili, l'an prochain. Nous le quittons en le remerciant chaleureusement. Et nous allons maintenant reprendre nos visites avec l'esprit libre et totalement décidés à oublier ces heures de cavalcade qui, si elles nous ont paru très pénibles, ont eu l'intérêt de nous faire connaître des endroits et des personnes que nous n'aurions pas vus sans l'incident du pickpocket ! Images attachées: | | J'allais dire que les rencontres sont des beaux moments d'un voyage... Euh ! Les rencontres-pickpocket pas vraiment ! (je me souviens tout à coup d'une mésaventure à Colombo... mais je m'éloigne !).
Que nous fais-tu visiter ensuite ? Impatiente Dolma, comme d'habitude...
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