Me voici de retour de
Cuba. Je vais donc envoyer une série de messages de retour sur cette destination.
Je n'avais pas compris toutes les discussions anarchiques et totalement surréalistes sur les trop cher, les pas trop cher, ce que représente le prix d'un repas de touriste pour un cubain, etc...
Mais après y être allé, sans devenir un spécialiste, je commence à comprendre ce que veulent dire les uns et les autres, et finalement, s'ils n'ont pas tout à fait raison, ni les uns ni les autres, il faut bien avouer qu'ils n'ont pas tout à fait tort ni les uns ni les autres...
Pour ceux qui veulent y aller et qui préparent un voyage à
Cuba, je vais donc tenter de faire le point avec différents messages abordant chque fois un point particulier.
Donc, dans ce message, je vais parler de la destination en général.
Tout d'abord, est-ce que cela vaut la peine d'y aller ?
De façon claire, je pense que oui, car j'ai pu voir des choses qui m'ont beaucoup plu. Bien entendu, c'était "mon" voyage et je l'ai un peu orienté vers ce que j'aimais. Je n'ai pas fait un trajet extravagant : en 11 jours,
La Havane,
Viñales,
Cienfuegos et
Trinidad, un périple d'environ 1500km
Je ne les décris pas ici, je ferais un message sur chacune de ces régions.
Ce que je voudrais souligner dans ce message-ci, c'est que l'économie de
Cuba est dans un déséquilibre sur le fil du rasoir. Vous savez probablement tous qu'il existe deux monnaies, mais vous ne savez sans doute pas qu'il existe plusieurs types d'économie dans le pays qui vivent en parallèlle avec des points de friction parfois asssez curieux et désagréables entre les différents niveaux.
A la base, il y a le niveau de vie officiel du cubain. Le salaire moyen se situe en dessous de 30$ par mois, et va d'une vingtaine de $ pour les plus modestes à un peu plus d'une trentaine pour les plus spécialisés (comme chirurgie des cubains sont à ce régime car 70% des actifs sont fonctionnaires. Ce salaire leur permet tout juste de ne pas mourir de faim, et le niveau de vie qui en résulte n'est pas folichon.
Une seconde économie s'est donc développée pour tout ce qui concerne les services : l'échange. Je ne vais pas faire de longues explications, ce sont des fruits de l'arbre du jardin contre un dépannage mécanique par exemple.
70% de l'économie cubaine est une économie de services, et donc les deux plus grandes richesses du pays sont la main d'oeuvre exportée et le tourisme
[note : le tourisme est compté comme export en économie : on vend des produits de services réalisés par le pays à des pays étrangers qui le payent dans leurs devises. Ça fait un peu bizarre de penser que payer une casa particular est un acte d'export pour
cuba, mais bon...]
La main d'oeuvre exportée, ce sont principalement des travailleurs de haute qualification (principalement du monde médical) envoyés en mission dans le monde (et tout particulièrement en Angola ou au
Venézuela, mais aussi
Honduras,
Panama et la
Bolivie) : leurs services sont payés chers entre états, et les personnes sont payées par
Cuba avec leurs niveau de salaire cubain (ils logés et nourris, mais quand mêmes, 30$ par mois, à Caracas ou à Tegucigalpa,...). L'estimation est d'environ 50000 personnes en cours de mission.
Au global, les exports sont répartis principalement en 4 postes officiels : le tourisme (plus de 40%), les produits miniers, le sucre et le tabac. A noter que
Cuba produit un peu de pétrole et pourrait en produire plus, mais il est cher à exploiter car lourd et il n'y a que deux rafineries dans le pays pour l'instant.
Pour la population, la conséquence est que les services de base (transport, logement et santé) sont peu chers, car essentiellement pris en charge par le gouvernement.
Il existe également un type d'export très difficile à évaluer qu'on appelle localement les remesas, et qui sont l'argent envoyé par la famille exilée à l'étranger.
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En terme d'économie, le tableau semble apocalyptique, mais le système avance cahin caha, avec l'ouverture en 2006 au droit des cubains à monter une petite entreprise (comme les taxis privés, les casas, des restaurants,...), avec un risque permanent d'écroulement, car le pays n'a pas accès aux emprunts internationaux à la banque mondiale ou au FMI.
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Préparer son voyage à
Cuba est donc dès le départ un choix difficile qui va dépendre de la débrouillardise de chacun, de sa capacité à se dépatouiller en parlant plus ou moins espagnol, en connaissant les bonnes personnes et les bons usages pour obtenir le rapport qualité/prix souhaité. Et je vous assure que ce n'est pas facile.
En terme de coût, le plus cher est certainement de passer par une agence française (par la plupart des agences françaises, car certaines commencent à travailler avec des casas), car la plupart achètent à un tour opérateur cubain qui est super taxé par l'état et envoie les clients dans des hôtels d'état avec des services de transport d'état.
Au final, vous n'aurez probablement pas mieux que ce que vous pourrez obtenir au prix de quelques acrobaties pour 30 à 40% moins cher, mais au moins, vous êtes avez quand même de bonnes chances d'avoir ce niveau minimal.
Se débrouiller tout seul sur place en prenant un vol sec est aussi possible. Il faut être suffisamment serein pour accepter une certaine incertitude, mais on trouve assez facilement des casas (le terme exact est casas particulares) dont le prix varie en général de 25$ à 30$, mais peut atteindre des prix beaucoup plus forts pour certains lieux exceptionnels.
Une solution d'organisation intermédiaire peut se faire en utilisant airbnb pour les premières nuits en arrivant. On est souvent entre 50 et 70$, vous pouvez aller sur le site airbnb pour vous faire une idée.
Il est également possible de se faire des transports par bus ou même par taxi collectif. Votre casa vous aidera pour cela, cela fait partie des usages.
Le seul problème est que compte tenu que le prix d'une nuit (avant taxes et impôts) représente un mois de salaire, les casas se sont multipliées, et toutes ne sont pas vraiment de même qualité, ni dans l'environnement, ni dans la qualité de votre hébergement.
[suite : les deux monnaies ]