Oltean · 20 septembre 2018 à 17:45 · 212 photos 65 messages · 11 participants · 4 047 affichages | | | À: Diamina · 29 septembre 2018 à 13:05 Message 41 de 65 · Page 3 de 4 · 1 192 affichages · Partager Salut Alain,
Où as-tu dégoté un parcours pareil?
Salut Diamina,
Eh bien, en partie grâce aux carnets qui ont précédé le mien (merci aux auteurs), et sinon par pure opportunité, sur le chemin de Yellowstone. La grotte Lewis et Clark et Missoula nous ont été suggérés par les gens que nous allions rejoindre à Sheridan.
Faisait-il chaud pendant votre parcours en été?
Plutôt chaud mais avec des coups de frais, vu l'altitude.
En tout cas, voilà qui sort des parcours habituels.... Tu es vraiment original!! Et à défaut de références musicales qui faisaient frémir doucement mes oreilles, tes références cinématographiques sont savoureuses!!!
Tu parles de cet article ? J'ai moi-même du mal à m'y retrouver dans les références.
Merci de cet agréable intermède qu'on prend plaisir à déguster sans modération.
Pourvou qu'ça doure ! | | À: Oltean · 29 septembre 2018 à 13:17 Message 42 de 65 · Page 3 de 4 · 1 188 affichages · Partager Pourvou qu'ça doure !
Oh je n'ai aucun doute à ce sujet....Entre ton carnet et celui de Pegguy vous m'avez redonné le gout d'aller faire des découvertes aux USA!! Merci. Je partirai la-bas fin février... les billets sont pris. | | À: Oltean · 30 septembre 2018 à 6:58 Message 43 de 65 · Page 3 de 4 · 1 151 affichages · Partager
Un état grand comme la moitié de la France et avec autant d'habitants que la seule ville de Marseille. On n'en finit pas de traverser le Montana, filant sur des plateaux déserts encadrés par des sommets lardés de longues coulées de neige. Le soleil donne à plein, mais dans l'air raréfié des hauteurs, ces congères coriaces défient l'été. Nous croisons fréquemment des pancartes qui indiquent plus de 9000 pieds, soit 2700 mètres environ.
The Big Country
Plateau
Nous retrouvons à Sheridan John et Barbara, que nous avions rencontrés l'an passé à Nashville. Ils nous font visiter la région.
Sheridan
NRA : National Rodeo Association
Dans la ville d'Ennis, un spectacle de rodéo attire tous les habitants du coin. Un vrai rodéo, pas l'attraction plan-plan de Forth Worth. Un cow-boy doit mettre à terre un petit taureau à la seule force de ses bras, en empoignant les deux cornes pour forcer l'animal à se tordre jusqu'à perdre l'équilibre. Pas gagné d'avance : la plupart des tentatives échouent.
L'art de créer des liens
Mais il existe encore des cow-boys ? "Ce sont des gens d'ici, d'habitude ils sont employés de bureaux, avocats, etc., expliquent nos hôtes. Il s'occupent du bétail pendant leur temps libre. C'est encore eux qui en ont la meilleure connaissance". On se dit que les avocats français ont certainement des loisirs plus sereins. D'autres s'emploient à manier le lasso pour capturer le cheptel. Les plus téméraires s'efforcent de conserver leur place sur le dos de bêtes furieuses. Les seuls qui réussissent ont l'art de se transformer pendant les interminables huit secondes de l'épreuve en pantin désarticulé capable d'encaisser toutes les ruades des bestiaux.
Prête pour aller danser
On vient en famille, l'audience siffle sa joie et ne ménage pas ses applaudissements, même quand les candidats mordent la poussière. Et ils la mordent souvent. Les spectateurs portent de grands chapeaux et des chemises brodées. "Pas mal de gens ne sont pas d'ici, souligne John. Depuis quelques années les Californiens viennent s'installer dans le coin. Ils vendent leur appartement pour s'acheter au Montana des grandes propriétés. On les reconnaît à leur habillement fantaisiste". Je ne vois rien de vraiment fantaisie dans l'accoutrement de ces gens, mais je comprends l'idée. Le Montana reste fidèle à une tradition pionnière. Porter le chapeau et la ceinture western n'est pas ici une posture : il s'agit du vécu le plus banal. Aussi, la chasse au gros gibier est un loisir courant. "Je prends parfois les chevaux pour partir plusieurs jours dans la montagne, dit John. Il m'arrive de chasser élans et wapitis. En cas de danger, je peux tirer sur un ours. Mon père m'a appris à manier le fusil, et j'ai éduqué ainsi mes enfants".
Enfant au drapeau
Son fils a travaillé dans la marine américaine. Et je me souviens que l'homme qui a abattu Ben Laden venait aussi de cet état. "Les enfants, on leur apprend à tirer sur des gophers", dit-il en désignant ce qui ressemble à un gros hamster sur le bord de la chaussée. Comme quoi on peut commencer à buter des rongeurs pour finir par dégommer l'ennemi public numéro 1.
Défilé du 4 juillet
Tifs patriotes
"Si quelqu'un a soif, qu'il vienne à moi, et qu'il boive."
La fête nationale donne lieu à une parade avec les gens du coin. Pas de flon-flon ou de défilé militaire : les gens ordinaires, associations et commerces parent leur véhicule de rouge et bleu et circulent lentement en ville en distribuant friandises et boissons. On me met en main une bouteille d'eau. Son étiquette dit : "Si quelqu'un a soif, qu'il vienne à moi, et qu'il boive." La citation de l'évangile de Jean est suivie par l'adresse d'une église. Fallait y penser.
Bigfoot avec nous
Attrape-moi si tu peux !
Assistance enthousiaste mais pas foldingue, au sein d'une déferlante de bannières étoilées. La célébration a tout d'une sincère réjouissance. C'est la fête aux revendeurs de tracteurs, aux vétérans du Vietnam ou de Corée, aux églises, aux hôpitaux pour enfants. Tous défilent pêle-mêle et soulèvent les mêmes vivats d'une foule heureuse de célébrer les opérations caritatives ou commerciales des gens du coin.
Donnez-moi madame s'il vous plaît...
Feu d'artifice le soir même, au cœur de l'obscurité. L'absence de toute pollution lumineuse, en ce lieu si loin de la moindre métropole, rend visible tous les détails de la Voie Lactée. Rien à voir avec la gigantesque pyrotechnie symphonique de Nashville. Seules les exclamations des gens du coin accompagnent un spectacle tout simple, à l'échelle d'un 14 juillet dans une de nos villes de province.
Superman en pyjama (exclusif)
Sur leurs grands chevaux
Je m'attendais à trouver dans ce pays de rednecks des gamins tarés à l'image du joueur de banjo de Délivrance, ou des dégénérés consanguins comme les films d'horreur nous en servent tant. Des fous de Dieu brandissant leur fusil en invoquant leur soutien à la NRA. Des pro-life fiers d'avoir voté Trump. A la place de quoi j'ai découvert des villages impeccables, des habitants polis et souriants, épris de liberté, scrupuleux au point de de rien nous asséner de leurs convictions que l'on devine si opposées aux nôtres. De sincères amoureux de la nature en dépit de leur passion pour la chasse. Ceux qui ont lu Jack London comprendront.
Cowboys welcome - Cowgirls too
Plat national
Ex-engagé
A Ennis
Avant notre départ de France, j'avais noté qu'en date du 4 juillet nous serions dans le Montana. Le titre de l'article que je devais écrire à cette occasion s'était naturellement imposé : fantasia chez les ploucs. Je me régalais par avance de la galerie de crétins que j'allais pouvoir observer en ce haut lieu de l'obscurantisme. C'était sans compter sur l'amicale bienveillance des gens du Montana, et le soin apporté à toute chose pour rendre l'existence agréable. Je comprends à présent la stupidité de mon préjugé. | | À: Oltean · 30 septembre 2018 à 11:42 Message 44 de 65 · Page 3 de 4 · 1 123 affichages · Partager Bonjour, Ta photo " Veteran owned business" me rappelle un souvenir du Wyoming, qui n'est pas très loin. Nous étions à Cheyenne pour les Frontier's Days et, les campings traditionnels alentours étant tous pleins, nous avons passé 2 jours dans un champ mis à disposition par une famille. Nous avions discuté un bon moment avec eux, c'étaient une famille de militaires, le père, puis maintenant les enfants, un des fils allait être déployé en Irak (c'était en 2009, en est il revenu?), la fille basée à Ramstein, un autre fils s'engageait à l'automne. Bref, ils nous expliqué que passer par l'armée valait tous les diplômes et une fois démobilisé, était un gage d'engagement dans n'importe quel entreprise, car les vétérans, jouissant d'une excellente réputation de fiabilité, droiture, et d'adhésion aux valeurs américaines fondamentales, cela pousse les employeurs à les préférer, quitte à les former ensuite dans leur nouvelle profession. | | À: Sissi57 · 30 septembre 2018 à 18:55 Message 45 de 65 · Page 3 de 4 · 1 082 affichages · Partager Bonjour, Ta photo " Veteran owned business" me rappelle un souvenir du Wyoming, qui n'est pas très loin. Nous étions à Cheyenne pour les Frontier's Days et, les campings traditionnels alentours étant tous pleins, nous avons passé 2 jours dans un champ mis à disposition par une famille. Nous avions discuté un bon moment avec eux, c'étaient une famille de militaires, le père, puis maintenant les enfants, un des fils allait être déployé en Irak (c'était en 2009, en est il revenu?), la fille basée à Ramstein, un autre fils s'engageait à l'automne. Bref, ils nous expliqué que passer par l'armée valait tous les diplômes et une fois démobilisé, était un gage d'engagement dans n'importe quel entreprise, car les vétérans, jouissant d'une excellente réputation de fiabilité, droiture, et d'adhésion aux valeurs américaines fondamentales, cela pousse les employeurs à les préférer, quitte à les former ensuite dans leur nouvelle profession.
Très intéressant, merci pour le complément. Dans notre cas, le fils vétéran n'a pas abordé le sujet, mais nous a raconté sa stupéfaction en débarquant en Corée du Sud, devant une foule hostile et vociférante, alors qu'il s'attendait à voir les gens les accueillir en protecteurs amicaux.
L'image de l'Amérique est vraiment quelque chose de particulier, même parmi ses alliés officiels. | | À: Oltean · 1 octobre 2018 à 6:51 Message 46 de 65 · Page 3 de 4 · 1 048 affichages · Partager L'accumulation de beautés naturelles ne finit-elle pas par lasser ? Après tant de gorges encaissées, parcourues ou non par des flots vifs, de cascades sèches ou humides, de déserts rocailleux, gorgés de soleil, recouverts de forêts pétrifiées ou de cactus imprécateurs, quel genre de panorama peut-il encore flatter le regard et l'âme ?
Yellowstone depuis Sheridan, Montana
La réponse se trouve à Yellowstone. Jadis, un volcan s'y effondra sous son propre poids. Désormais le magma affleure sous une mince couche de terre. De là des phénomènes hors du commun, que jamais le regard d'un homme n'était censé contempler. Des jets sulfureux surgissent de terre, de façon imprévisible ou suivant un agenda scrupuleux. De simples prairies où des chaudrons bouillonnants exhalent des bouffées de gaz. Des marmites de boue débordent de coulées ocres ou jaunâtres. Des théories de fumerolles vous entourent comme l'on fait naguère les flammèches autour du chasseur maudit. C'est à la fois le Pic de Dante, Stromboli et cramé contre cramé.
Ça bout de souffle
Domaine de l'ocre
Visiter cette cuisine du Diable n'est pas sans risque. Les sentiers sont posés sur des passerelles de bois, sans quoi le pied risquerait de s'enfoncer dans un torrent de lave. Se baigner dans certains lacs, c'est envisager un destin de homard. Il arriva qu'un intrépide voulût observer de près ce combat des quatre éléments. De cet Empédocle de week-end, on ne retrouva guère qu'une tong abandonnée au bord d'un cratère irradiant un azur irréfutable. L'acide avait fait le reste, et Yellowstone digéré celui qui osa défier la nature.
Beau et mortel
Coulées douces
Boue létale
L'une de mes histoires préférées est celle d'une simple mare d'eau chaude, que voulurent exploiter des hommes au début du XXe siècle. Comment résister à l'offrande d'une telle chaudière ? Ils employèrent un simple tuyau pour récupérer le précieux liquide. Mais la nature ne l'entendit pas ainsi : diminuée de quelques centimètres, la mare pacifique se transforma en geyser impétueux. Les hommes, penauds d'avoir entrouvert cette boîte de Pandore, défirent à la hâte leur installation et rendirent au cratère l'eau qu'ils lui avaient soutirée. En vain. L'esprit sorti de l'Enfer refusa de quitter la surface de la terre. Même rendue à son niveau original, la mare devait désormais manifester son courroux jaillissant. On en admire aujourd'hui encore les éclats turbulents au Solitary Geyser.
Au cœur de Yellowstone
Les éléments ne sont pas les seuls dangers du lieu. Des troupeaux de bisons occupent des terrains entiers, en totale liberté. Ils traversent la chaussée quand bon leur semble. Le code de la route local leur donne entière priorité sur les voitures. D'où des bison jams, ou embouteillages à bisons, assez fréquents. Quand l'un de ces bestiaux choisit de piquer un roupillon sur le bitume, rien à faire. Klaxonner est interdit. Des centaines d'autos attendent alors que le bovidé daigne s'installer ailleurs.
Placide au gros museau
Il est évidemment tentant de descendre pour aller titiller cette grosse vache poilue. Mauvaise idée, le gros pépère peut vous prendre en grippe et vous encorner au gré d'une course à 50 à l'heure, avant de finir le boulot en vous piétinant. Certains mauvais coucheurs, rendus téméraires par la fréquentation assidue des Buffalo Grill, ont accompli leur séjour sous forme de steak tartare. Alors, on attend. Avec philosophie : après tout, c'est la version locale des incidents voyageurs du RER A.
D'abord, je passe. Après, on verra.
Une autre cause d'embouteillage est l'ours. Non, celui-ci ne dort pas sur la route. Mais quand un automobiliste a le bonheur d'en apercevoir un, il s'arrête aussitôt, suivi par la ribambelle d'autres observateurs ébahis. On reconnaît un bouchon à ours à la présence de rangers, ordonnant aux gens de ne pas s'approcher et surtout de ne pas courir. La distance de sécurité est établie à 91 mètres. Pourquoi 91 ? Parce que c'est la conversion dans le système métrique de la mesure de 100 yards. Bon, normalement c'est 91 virgule 44, mais on n'a pas envie de chipoter avec un ranger sang et eau lançant de sourds "don't run !" à des touristes hilares brandissant leurs smartphones.
Touchez pas au grizzli
Car il y a du monde à Yellowstone. Beaucoup de monde, des Chinois, des Pakistanais, des Français. Et comme toute cette foule se retrouve au même moment au même endroit, il faut parfois attendre pour trouver une place de parking. C'est l'endroit le plus fréquenté que nous ayons vu dans les parcs américains, davantage encore qu'au Grand Canyon. Fâcheux ? Sans aucun doute. De nature à amoindrir l'enthousiasme de cette découverte ? Certainement pas.
Cooke City | | À: Oltean · 2 octobre 2018 à 6:46 Message 47 de 65 · Page 3 de 4 · 1 007 affichages · Partager Une fois le sommet atteint, la longue redescente s'impose. Phase obligée et parfois déprimante. Pour nous, elle s'apparente à un retour vers le Pacifique, jusqu'à la cité d' Oakland. Mais un retour ponctué d'étapes utilitaires - nous voici de nouveau dans l'Amérique hors des guides.
Entre Yellowstone et Bellevue, Idaho
Revoici donc le Montana et une ville nommée Dillon, si loin du train-train des voyageurs. Un endroit d'emblée accueillant, alignant boutiques au service des passions premières de la région - la chasse et la pêche.
Un drôle de supermarché pour cow-boys attire notre attention. Nous y entrons : c'est une sorte de Bricorama où les tondeuses à gazon sont remplacées par des selles de cheval, les rouleaux à peinture par des balles de fusil et le rayon sanitaires par une galerie de Stetsons.
Le Montana a d'incroyables talons
On trouve même des produits pour l'arrière-train, servis par un visuel aussi vulgaire qu'explicite. Mais on peut le comprendre, le métier de garçon vacher a ses côtés sombres. Pardon pour les admirateurs de la Chevauchée fantastique, mais si ça se trouve, même John Wayne devait soigner ses miches.
Monkey business
Dillon by night
Centre ville
Place publicitaire
Tous en selle
Sur la route
Avant de quitter Dillon, nous dînons au Sparky's Garage, suivant les conseils de nos amis de Sheridan. Contre toute attente, c'est fabuleux. Pour une fois, c'est de la cuisine américaine inventive et dosée avec goût. Je savoure une extraordinaire salade avocat-fraise-poulet sur tapis de laitue et couronne le tout d'une lime pie aussi savoureuse qu'à Key West. Par-dessus le marché, pour un prix très raisonnable, et parmi une clientèle strictement locale.
Sur le chemin de l' Idaho, l'état fier de ses patates, nous croisons le panorama lunaire de Craters of the Moon. Des scories noires à perte de vue n'en finissent pas d'accrocher l’œil. Encore le fait de volcans, mais avec un résultat tout à l'opposée de Yellowstone. On chercherait en vain par ici des chaudrons infernaux aux fragrances d’œufs pourris jouxtant de verdoyantes pairies bisonnantes. L'endroit peut séduire cependant : en dépit de son éloignement de tout, les visiteurs sont là, attirés par des randonnées au sein de ces écorchures telluriques.
Craters of the Moon
Notre destination du jour : Bellevue, dans l' Idaho. Encore un nom français, comme on en voit tant par ici : Dubois, Nez Percé, et peut-être Grand Teton, chose que certains entêtés aiment à soutenir. Mais pourquoi Bellevue, qui d'ailleurs ne se prononce pas du tout Bellevue ? Parce que c'est le seul endroit où nous ayons pu dénicher un hôtel abordable. Contre toute attente, la région est courue par du beau monde. Dans la Sun Valley toute proche se réunissait le gratin de la scène américaine - Eroll Flynn, Gary Copper, Marylin Monroe, pas mal d'autres vedettes et quelques Kennedy. On avait fait de cette vallée encaissée entre des monts drus une station de sports d'hiver, qui devait persévérer dans sa vocation pour gens de la haute. La Sun Valley offre désormais toute la panoplie des attractions pour villégiateurs bobos et fortunés, maisons de haute couture, cafés bios et restos sélect.
Hemingway Memorial
La face du grand homme
Monument à l’écrivain
Une chose cependant rend l'endroit attachant. Hemingway y avait ses habitudes. Ici, il acheva Pour qui sonne le glas, avant de faire sonner le glas pour sa propre personne. Un petit mémorial baigné par un ruisseau lui rend hommage en pleine nature. Sa tombe, à quelques kilomètres de là dans le cimetière de Ketchum, est plus difficile à dénicher. Elle se trouve dans un coin ombragé, recouverte d'offrandes de circonstance : bonnes bouteilles, articles de pêche et tapis de pièces de monnaie. Sans doute en évocation de l'unique sou qu'il put sortir de ses poches à Key West, en réponse à son épouse d'alors qui avait fait creuser une piscine pharaonique. Mais Ernest en avait : il devait bien vite remonter la pente pour atteindre d'autres sommets.
Cimetière de Ketchum
Tombe d’Ernest, recouverte de pièces
Du Saint-Vivant pour le bon vivant | | À: Oltean · 3 octobre 2018 à 6:30 · Modifié le 3 oct. 2018 à 18:47 Message 48 de 65 · Page 3 de 4 · 969 affichages · Partager "Les conducteurs doivent se préparer à effectuer des manœuvres de dernière minute. La conduite est généralement plus rapide et plus agressive qu'aux États-Unis."
Les conseils aux voyageurs dispensés par le gouvernement américain aux futurs visiteurs de la France caractérisent par défaut la façon de conduire au States : une philosophie de la route qui fait d'un déplacement un simple moment de la journée comme un autre, un espace de temps à part entière où engueulades et coups de sang sont hors de propos. On s'installe au volant comme dans son salon. La circulation, loin des grandes métropoles, est une opération sereine où nul stress ne vient s'inviter.
Go west
Le cliché des grands espaces prend toute sa dimension dans la campagne. L'horizon grand ouvert offre une nature à perte de vue. Nous traçons une route au long cours dans un océan minéral seulement bordé par des cordillères lointaines ou la rotondité de l'horizon. Un capitaine au long cours ne doit pas éprouver autre chose du haut de la dunette.
Il est toutefois facile de se laisser abuser par le ruban noir filant droit vers l'infini. Le conducteur désœuvré doit dès lors se garder du gibier pouvant surgir à l'improviste : sans doute le plus grand danger par ici, accentué par le doux confort d'une conduite placide assistée par le régulateur de vitesse.
De Bellevue à Boise
M1A1 Abrams Main Battle Tank, Elmore County, à 1h de Boise
Après Bellevue et la Sun Valley, cap sur la capitale de l' Idaho. Seuls les candidats à Question pour un champion, j'imagine, peuvent citer spontanément son nom : Boise. Evidemment prononcé à la sauce locale, à savoir "boïssi".
Capitole de Boise
Cloche de la Liberté, en réplique
C'est vrai qu'il fait beau ici. Après Helena, la morte-vivante, nous retrouvons enfin une cité qui tient son rang. On n'échappe certes pas à l'inamovible capitole d'état écrasant de solennité, devant lequel une réplique parfaite de la Liberty Bell philadelphienne a été exposée. Mais les rues alentours sont garnies de petits commerces où l'animation fait plaisir à voir. Atmosphère tout en politesses et bien comme il faut. Un peu trop lisse peut-être : nous ne sommes plus chez les cow-boys.
Une croix basque à l'entrée du quartier
Nous serions en vérité bien davantage chez les Basques. La ville rend un hommage appuyés à ces voyageurs qui contribuèrent à l'histoire de l'Amérique en général, depuis l'odyssée de la Santa Maria, et au développement de cette région en particulier.
Stars, stripes et Euskadi
Pavés de noms (pas trouvé le mien)
"Les Basques étaient durs à la tâche, obstinés, capables de s'investir dans des tâches ingrates", nous apprend le Basque Museum & Cultural Center. Il fallait du caractère pour venir s'installer dans cette région inhospitalière, alors désertique et pleine de périls. Leur abnégation valut aux Basques une juste reconnaissance. Ils devaient former une partie intégrante de la nation américaine, tout en se souvenant de leur héritage européen - surtout de la péninsule ibérique, il faut le dire, les régions basques françaises ne sont qu'évoquées en passant.
Ornements qui collent (aux basques)
Le petit musée est très bien fait, avec une exposition d'antiques photographies de Basques d'ici ou d'Europe rendues en trois dimensions. Nous n'échappons pas à la galerie patriotique des Américanos-Basques qui s’illustrèrent pendant les différents conflits, présentée au son du générique de Brothers in arms.
Fresque commémorative du peuple basque
Armoire électrique
Le petit quartier basque, une ville dans la ville, se visite avec plaisir. Une fresque murale rappelle l'histoire de ce peuple en quelques images. Sur un trottoir, nous croisons un type coiffé du traditionnel béret. Il est en train de faire mijoter une généreuse paella dans une large poêle. Pas un plat basque, il est vrai, mais dans un pays qui entretien des rapports très particuliers avec la gastronomie, une telle occasion ne se loupe pas. Crevettes, riz et petits légumes seront pour une fois notre ordinaire du jour.
Tony, l'homme à la paella | | À: Oltean · 3 octobre 2018 à 16:34 Message 49 de 65 · Page 3 de 4 · 936 affichages · Partager Bonjour, Merci pour cette fantastique description. Tel un roman que l'on ne ferme plus j'ai dévoré chaque étape. | | À: Edmep · 3 octobre 2018 à 18:45 Message 50 de 65 · Page 3 de 4 · 924 affichages · Partager Bonjour, Merci pour cette fantastique description. Tel un roman que l'on ne ferme plus j'ai dévoré chaque étape.
A ce point ? Vite, y a-t-il un éditeur dans la salle ?
Sans rire, votre message est vraiment encourageant, c'est moi qui remercie ! | | À: Oltean · 4 octobre 2018 à 6:21 Message 51 de 65 · Page 3 de 4 · 893 affichages · Partager Sur le bord de l'autoroute, une immense pancarte retient mon attention. Elle figure le mufle criard d'un Tigre volant, l'un de ces avions de guerre emblématiques du combat contre la tyrannie. Un nom accompagne la fresque : Warhawk Air Museum, à Nampa. Renseignements pris, ça se trouve dans la proche banlieue de Boise. Autant dire trois fois rien. Me voici donc devant un vaste hangar flanqué de l'inamovible drapeau américain. Je salue au passage un type plongé dans les plates-bandes, sans doute le jardinier du musée, et pousse la porte de l'imposante baraque.
Warhawk Air Museum, à Nampa
La pancarte disait vrai : un authentique Curtiss P-40 décoré de la gueule colorée des Flying Tigers vous bondit dessus dès l'entrée. Sur ce genre d'appareils, dépassés techniquement, des aventuriers idéalistes allaient se frotter en Chine à l'envahisseur japonais. Jean-Michel Charlier comparait les Tigres Volants aux Brigades Internationales. Dans les deux cas, il s'agissait d'engagés volontaires, agissant hors de tout cadre officiel, vent debout contre la dictature - qu'elle soit incarnée par Franco ou Hirohito.
L’œil du Tigre
L’immense hangar
Les Tigres font évidemment songer à la série télé, bien médiocre dans mes souvenirs, intitulée Têtes Brûlées, où les Corsairs aux ailes pliées ont remplacé les P-40. Dommage que son titre n'ait pas repris celui des mémoires de Pappy Boyington, Baa Baa Black Sheep.
Armes des escadrilles de Tigres Volants et signatures des aviateurs
Le type des plates-bandes vient me saluer. " Where are you from ?" me demande-t-il selon la formule consacrée. " Ah, Paris. Vous savez, je parle français", me dit-il alors dans notre langue avec une prononciation impeccable. Je n'en crois pas mes oreilles. " Mais je parle français comme beaucoup d'Américains, non ?" s'esclaffe-t-il devant ma mine déconfite.
Il me serre la main. " Je suis le directeur de ce musée." J'ai l'air fin de l'avoir pris pour un jardinier. Sa carrure à la Buck Danny aurait dû me mettre la puce à l'oreille. Il cherche ses mots, mais quand il les trouve, il les dit sans accent tout en oscillant, en bon Anglo-Saxon, entre le tu et le vous. Ce colonel retraité de l'US Air Force a travaillé à Bruxelles pour l'OTAN et résidé quelque temps à Nancy, entre divers engagements militaires à travers le globe. En guise de faits d'armes, il me raconte la façon dont il épatait les officiels avec sa maîtrise du français. Il est vrai qu'il y a de quoi.
Beeson, a local hero
" Il y a peu de choses sur la France, ici. Mais attends, je vous montre quelque chose". Il m'amène devant la vitrine consacrée à Duane W. Beeson. " C'est un piloté né ici, à Boise. Il s'est engagé comme volontaire dans la RAF avant l'entrée en guerre des Etats-unis. Son uniforme anglais porte les ailes américaines, tu vois ?" En effet. " Et quand les Etats-unis sont entrés dans le jeu, il est resté en Angleterre, mais avec une tenue portant les armes des deux nations". Je n'y connais pas grand chose, mais le fait a l'air exceptionnel. " Il est devenu un as sur P-51C".
N'est-ce pas cet avion américain motorisé par Rolls-Royce que les Britanniques ont baptisé Mustang ?
" Oui, le Mustang. Viens, nous avons son appareil ici."
Il m’entraîne à grand pas à l'autre bout du musée où trône l'appareil de Beeson, le Boise Bee. Sous le cockpit, vingt croix allemandes noires sur fond blanc attestent la férocité de l'abeille de Boise.
La Boise Bee, terreur des Allemands
" On le distingue du P-51D grâce à la forme du canopy. Comment dites-vous en français ?"
Oui, canopy, je comprends. La verrière, quoi. Les deux Mustangs côte à côte sont parés pour le décollage. Ce n'est pas une image : les avions d'ici sont en parfait état de vol et un grand spectacle est organisé chaque année fin août.
Avant de prendre congé, le directeur me fait remarquer des skis sous l'avion de Beeson. " Il était prévu de déployer des chasseurs en Alaska, pour contrer une éventuelle attaque japonaise de ce côté-là". Il est vrai que l'Empire du Soleil avait attaqué Dutch Harbour, dans les Aléoutiennes, en 1942 - à ce que j'ai lu, une diversion pour éloigner la marine américaine de Midway.
Un Sabre rescapé du ciel de Corée
Brochure sur Dachau
Singe de l’espace
Coréen exploité par la Chine sous l’œil de Staline
Laissé à moi-même, j'explore le musée. Des jets de différentes époques, des Mig dont un porte les couleurs américaines, un Fokker de l'époque du Baron Rouge ; des véhicules où l'on note une Jeep semblable à celle qui écrabouille l'infortuné Chuck Willys à la seconde case de Matricule Triple Zéro.
A quand le retour ?
Gare aux fake news
Mais l'endroit est bien plus riche encore. De nombreux documents sont mis à la disposition des visiteurs, explorant des pans entiers de l'histoire technologique et militaire des Etats-unis. Je feuillette un rapport longtemps resté top secret sur les plans d'invasion du Japon en 1945. Les hypothèses qu'il soulevait, en terme de durée et de coût en vies humaines, ont certainement pesé dans la décision d'employer la force atomique.
Snoopers and how to blast 'em, 1943
Un autre document confidentiel, Snoopers and how to blast 'em (Les intrus et comment les descendre), de 1943, explique des techniques de combat aérien. Étonnant : ce fascicule très officiel est illustré de fort plaisante façon, du moins selon les critères de ces années de guerre féroce. Ces dessins comiques étaient sans aucun doute une façon de faire entendre le message en évitant le recours à des schémas trop arides.
Détail de Snoopers and how to blast 'em
Je découvre dans la même veine une collection de dessins signés Gus Roos, un natif de Boise.
Bien vu (et gonflé en temps de guerre)
La WAC sexy
Quelques illustrations et des strips bien dans leur époque, comparables dans l'esprit (sinon le talent) aux BD du célèbre Milton Caniff. De courtes histoires de Roos mettent en scène Winnie the WAC, membre des Women's Army Corps, bien entendu sexy et un peu sosotte, et sa brune alter-ego Cookie Jones. On se croirait dans un épisode de Pin-up de Yann et Berthet. Mais qui a donc jamais entendu parler de Gus Roos ? Je ne trouve quasiment rien sur internet.
Encore Winnie (pas l’oursonne)
Deux strips de Gus Roos
Je quitte cet endroit avec regret. Il propose bien plus qu'une simple exposition d'avions, telle que j'ai pu en visiter à Planes of Fame, au sud du Grand Canyon. Le musée de Nampa offre d'inestimables ressources documentaires à qui voudrait approfondir sa connaissance de l'histoire du siècle dernier. La chose n'est peut-être pas superflue à une époque où de nouveaux totalitarismes montent en puissance.
Au revoir Cookie | | À: Oltean · 5 octobre 2018 à 7:42 · Modifié le 5 oct. 2018 à 9:24 Message 52 de 65 · Page 3 de 4 · 839 affichages · Partager
A l'ombre des couleurs
Plein sud direction Elko. Pourquoi Elko ? Parce que nous n'avons pas trouvé d'autre pied-à-terre à une distance raisonnable. Et puis, c'est aussi une "ville basque", au même titre que Boise.
De Boise à Elko
La route est presque déserte. Certains prétendent que la région que nous traversons est l'une des moins fréquentées du monde occidental.
Une présence sur la route
Elko terre de buckaroos
Elko est dans le Nevada. Ici, guère d'allusions au Pays Basque - il faut dire que nous arrivons trop tard pour le festival qui lui est consacré chaque début d'été - mais des buckaroos. Ça vous parle ? c'est une déformation de l'espagnol vaquero. Bref, c'est ainsi qu'on appelle ici les cow-boys.
Chapeaux !
Lassos à gogo
A deux pas de l'hôtel se trouve une boutique pour buckaroos. Pas un nouveau supermarché comme à Dillon, mais un vrai magasin d'artisanat : selles, lassos, couvre-chefs, chemises en tissus résistant, tout est à disposition pour mener le bétail à la rivière rouge au son de l'harmonica. Sauf peut-être la poudre-qui-soulage-le-derrière, mais il est possible qu'elle soit ici vendue sous un emballage moins explicite.
Cuirs en file
Pile à faces
Techniquement, c'est pas faux
Le Nevada, c'est aussi le pays des casinos. Nous logeons dans l'un d'entre eux. Pas grand chose à voir avec Las Vegas, l'endroit est modeste et peu achalandé. Un seul type de bandit manchot est proposé, sous différents habillages : celui où on doit aligner des symboles ésotériques pour former des combinaisons plus ou moins gagnantes. La machine avale des billets. J'enfourne des sommes de un dollar histoire de titiller le démon du jeu.
Notre hôtel-casino
La mécanique est prise d'un hoquet subit : son manège s'est arrêté sur une rangée de hiéroglyphes sibyllins. Voilà que le bidule s'emploie à clignoter frénétiquement telle une Tour Eiffel sous l'ère Hidalgo. Au cœur de son écran s'emballe un compteur à grande vitesse.
J'ai contre toute attente touché un lot pour avoir enfoncé un simple bouton "parier" ! Un pêcheur du dimanche ayant ferré un monstre marin ne doit pas ressentir autre chose.
L'engin poudroie sur un air de carnaval tandis que des nuées de pixels surgissent on ne sait d'où pour former des figures éphémères sitôt dissoutes dans un euphorique chatoiement. Des lignes se tracent toutes seules, surlignant d'un trait lumineux maintes combinaisons heureuses célébrant un hymne à la prospérité. La Fortune aux doigts argentés s'annonce-t-elle donc de la sorte à celui qui brave les aléas ?
Je me demande dans un éclair comment je ferai pour encaisser une somme d'un million de dollars. La Banque Postale accepte-telle les chèques américains ?
La machine infernale se fige au pinacle de son tintamarre et annonce le gain : treize dollars et quarante-et-un cents.
Bon. A défaut de finir millionnaire, j'aurai au moins préservé le budget familial en rentrant dans mes frais. Je vais échanger le ticket gagnant contre des dollars sonnants et trébuchants auprès d'un caissier blasé.
Je comprends mieux les mères de famille et les quelques types affairés à pianoter une touche "bet", sortant à intervalle régulier de nouveaux dollars pour assouvir leur bécane qu'ils fixent d'un air halluciné. Que ne donnerait-on pas pour revivre le moment sublime où tout étincelle, se précipite et s'achève dans la révélation du gain ? La petite mort a bien des appâts. | | À: Oltean · 5 octobre 2018 à 14:07 Message 53 de 65 · Page 3 de 4 · 803 affichages · Partager Je découvre ce carnet ce matin et j'adore. Serait-ce devenue "fan" après avoir lu Nord et Sud : de Chicago à la Nouvelle-Orléans? Je crois bien que oui. J'aime toujours les routes qui mènent on ne sait trop où et qui nous font découvrir autre chose que ce que nous disent les guides touristiques. L'humour que tu y mets me fait bien rigoler... J'ai reçu à Noël dernier un cadeau tout simple, imprimé maison qui disait:
"Suivez vos rêves, ils connaissent le chemin"
On peut avancer sans tout planifier à la découverte de la vie ailleurs et autrement Belle écriture! Je vois pourquoi je préfère lire que d'écrire.
bon je retourne réviser mes notes de voyage en Irlande et démêler mes photos. | | À: Risiol · 5 octobre 2018 à 17:55 Message 54 de 65 · Page 3 de 4 · 782 affichages · Partager Je découvre ce carnet ce matin et j'adore. Serait-ce devenue "fan" après avoir lu Nord et Sud : de Chicago à la Nouvelle-Orléans? Je crois bien que oui. J'aime toujours les routes qui mènent on ne sait trop où et qui nous font découvrir autre chose que ce que nous disent les guides touristiques. L'humour que tu y mets me fait bien rigoler...
Heureux de te lire ici, Hélène. Il y a assez peu de commentaires dernièrement et je me demandais s'il restait des lecteurs...
J'ai reçu à Noël dernier un cadeau tout simple, imprimé maison qui disait:
"Suivez vos rêves, ils connaissent le chemin"
On peut avancer sans tout planifier à la découverte de la vie ailleurs et autrement Belle écriture! Je vois pourquoi je préfère lire que d'écrire.
bon je retourne réviser mes notes de voyage en Irlande et démêler mes photos.
Oui, oui, très juste, on peut planifier assez loin tout en laissant une part de liberté pour appréhender l'imprévu. Les Etats-unis se prêtent bien à ce petit jeu. | | À: Oltean · 5 octobre 2018 à 21:04 Message 55 de 65 · Page 3 de 4 · 761 affichages · Partager Heureux de te lire ici, Hélène. Il y a assez peu de commentaires dernièrement et je me demandais s'il restait des lecteurs...
Je savoure tes textes, même si c'est silencieusement derrière mon écran et je vais noter ton trajet, j'aime beaucoup ces bourgades, concentrés de cette Amérique profonde qu'on adore traverser, mais où on ne songerait pas à rester, incarnations de nos rêves américains, perdues au milieu de ces immensités, qui elles aussi nous fascinent, tant d'espace libre ayant disparu de notre vieille Europe | | À: Oltean · 6 octobre 2018 à 9:22 Message 56 de 65 · Page 3 de 4 · 735 affichages · Partager
Butch Cassidy (qui y est)
Certaines destinations, a priori, promettent peu. De ce point de vue, Winnemucca est une splendide réussite : il n'y a rien à y faire. L'endroit possède une petite renommée pour avoir été le témoin d'un hold-up perpétré par Butch Cassidy et sa bande. C'était en 1900. On pensait trouver une évocation de cette légende de l'Ouest, une statue, une plaque commémorative, des porte-clefs en plastique certifié. Que dalle. Pourtant, Robert Redford avait revisité la légende de l'outlaw dans les années 1970. Rien n'y fait : Cassidy est déclassé, et rien sur Robert. Sauf un bar, dont la façade glauque nous dissuade d'en pousser la porte.
Un lien avec Sundance Kid ?
Trucks en stock
Nous sommes encore en pays basque
Elko, Winnemucca, Reno, South Lake Tahoe
Telle est la vie du voyageur impromptu, traçant son voyage au fil d'étapes négligées par les grands circuits. La méthode peut avoir du bon - sans quoi nous n'aurions visité ni le Montana, ni Elko - mais comporte son lot inévitable de déchet. Et sans vouloir être désagréable pour les gens de Winnemucca, cette dernière localité répond parfaitement aux critères du tri sélectif.
Reno centre
Massif
Reno aussi a une sale réputation. Ce serait pour le coup un autre Las Vegas, mais en plus miteux. Est-ce justifié ? Une simple pause déjeuner dans cette ville ne nous en donne pas l'impression. Les ors clinquants des grands casinos sont bien là, accueillant joueurs dans une atmosphère éthérée et, selon la rumeur, saturée d’oxygène pour maintenir tout ce beau monde dans une douce euphorie. Quoi qu'il en soit, cela fonctionne et possède un charme certain qui rend la fréquentation fugitive des tables de jeux moins sordide qu'on pourrait se le figurer.
Rive sud du Lac Tahoe
Stars, stripes and Tahoe
Nous dormons ce soir près du Lac Tahoe. L'endroit est connu : il s'agit d'un des plus grands lacs de montagne américains. Peut-être, mais pas de coup de foudre. Il y a trop de monde, des 4x4 charrient des bateaux emplis de kayaks tandis que des enfilades infinies de cyclistes en habits fluo se disputent le trottoir avec des joggeurs musculeux.
Et puis, des lacs comme ça, il y en a plein chez nous, et s'ils sont un peu plus petits, on se demande ce que ça change à l'affaire. Certes, c'est joli. Mais bon, de là à faire le voyage transatlantique pour jouer des coudes sur les rives du lac Tahoe...
Premier accroc du voyage pour l'hébergement : la chambre climatisée avec baignoire dûment réservée ne comporte ni baignoire, ni climatisation. La piscine quant à elle est à sec. A la réception, une autre famille a encore moins de chance que nous puisque sa réservation s'est évanouie dans la nature. Je vois le père, PC portable grand ouvert, faire les cent pas dans la réception, en ligne directe avec un gérant visiblement peu concerné par l'affaire, tandis que femme et enfants virent pivoine.
A l'écoute de mes pauvres problèmes de clim, la réceptionniste réagit comme dans mes lointaines lectures de Pif Gadget. Elle se dresse, ouvre un placard, en extirpe une poche de glace qu'elle plaque sur le haut de son crâne. Puis, ainsi coiffée, elle emprunte la sortie pour s'en aller déambuler au petit bonheur la chance dans la pinède bienfaisante. Tant pis pour les visiteurs avec leur lot de clim fantôme, de baignoire invisible et de réservation évanescente. Mais il faut respecter la douleur d'une hôtesse au bord de la crise de nerfs.
Pluie consolatrice
Au crépuscule | | À: Oltean · 6 octobre 2018 à 11:52 Message 57 de 65 · Page 3 de 4 · 718 affichages · Partager Oui, oui, très juste, on peut planifier assez loin tout en laissant une part de liberté pour appréhender l'imprévu. Les Etats-unis se prêtent bien à ce petit jeu.
oui et ailleurs aussi parfois. En France nous avions été émerveillés en nous retrouvant sans le planifier, à Baume-les-Messieurs...
Décevante mésaventure à cet hébergement. Accueil plutôt inhabituel il me semble. Ces deux dernières photos sont magnifiques. On dirait presque du noir et blanc avec une touche de couleurs | | À: Sissi57 · 6 octobre 2018 à 12:04 Message 58 de 65 · Page 3 de 4 · 712 affichages · Partager Je savoure tes textes, même si c'est silencieusement derrière mon écran et je vais noter ton trajet, j'aime beaucoup ces bourgades, concentrés de cette Amérique profonde qu'on adore traverser, mais où on ne songerait pas à rester, incarnations de nos rêves américains, perdues au milieu de ces immensités, qui elles aussi nous fascinent, tant d'espace libre ayant disparu de notre vieille Europe
Hello Sissi,
C'est trop souvent vrai, hélas. Les grands espaces se font rares sur notre continent. On mesure mal l'intense impression de liberté que l'on peut ressentir à l'intérieur des terres américaines. | | À: Risiol · 7 octobre 2018 à 10:36 Message 59 de 65 · Page 3 de 4 · 673 affichages · Partager Décevante mésaventure à cet hébergement. Accueil plutôt inhabituel il me semble.
Oui. C'est très rare aux Etats-unis, selon notre expérience. D'ordinaire, le sens du service est exceptionnel et tout est mis en oeuvre pour bien servir le client. Mais là, c'est le pompon. L'hôtel est laissé entre les mains d'une réceptionniste complètement débordée et sans aucun pouvoir. On comprend son moment de faiblesse. Le gérant, lui, est loin d'ici, à Sacramento, et la seule suggestion qui nous est donnée, c'est de l'appeler ou de lui écrire. Pour remplacer la clim, ce qui est le sujet le plus critique au vu de la chaleur ambiante, on nous donne un petit ventilateur, qu'il faut recouvrir d'un linge humide.
J'ai écrit à la fois au gérant et au site de location. En bref, le premier m'a répondu que c'était comme ça, il n'y a ni baignoire ni clim, et la piscine est à l'abandon depuis des années, fin du débat. On a connu des professionnels plus conciliants. J'ai mieux compris, à ce moment, le désarroi du type dont la réservation s'était envolée.
Le site de location m'a demandé des photos pour appuyer mes dires. J'ai répondu que je ne savais pas faire de photo d'une clim qui n'existe pas. Ils ont fini par en convenir et remboursé une partie du prix payé.
Ces deux dernières photos sont magnifiques. On dirait presque du noir et blanc avec une touche de couleurs
Merci ! L'approche du crépuscule et l'averse abondante expliquent le ton discret des couleurs. | | À: Oltean · 7 octobre 2018 à 12:26 Message 60 de 65 · Page 3 de 4 · 655 affichages · Partager
Lac Tahoe, Sacramento, Oakland
Nous entrons dans Sacramento, la capitale californienne. On a beau fuir les clichés, ils vous rattrapent au galop : sitôt garés au centre de Sacramento, nous voyons surgir un jogger tous pectoraux déployés. Au ralenti, ce Schwarzenegger en petites foulées aurait fait un tabac dans Baywatch.
Bled runner
Sacramento est une ville tranquille. Trop, sans doute : en ce dimanche, les rues sont vides et les commerces fermés. Un seul resto est ouvert. Mais quel resto ! Tous les noceurs du coin se donnent rendez-vous à Pizza Rock, sous une voûte imitant celle de la Chapelle Sixtine : dans la version californienne, Dieu le Père tend à Adam une guitare électrique. Bien sûr, il n'y manque pas, au pays de Mickey, l'ange.
Effet bœuf sous le toit
Question déco, on a vu grand. Un énorme camion a été encastré dans un mur et l'engin surplombe ainsi une partie de la salle. Et ce cauchemar droit sorti de Duel se met à beugler comme mille diables quand les buveurs de Bud Light célèbrent un happy birthday. On l'a compris, ce n'est pas un resto zen.
Coucou suisse, version Californie
La route pour finir nous mène dans le voisinage de San Francisco. Les tarifs de cette dernière ville étant ce qu'ils sont pour l'hébergement, nous nous sommes rabattus sur Oakland. Non sans déplaisir d'ailleurs, fidèles à notre volonté de ne pas aller "là où tout le monde va". Et puis, nous avons déjà visité San Francisco en 2011. Cette fois-ci, nous irons dans ces coins que nous ne connaissons pas encore.
Fresque murale à Oakland
A quoi ressemble Oakland ? Il faut bien le dire : à une banlieue digne de certaines zones franciliennes, et pas des plus fréquentables. "Il ne faut rien laisser de visible dans la voiture, nous dit notre hôte. Il y a sans cesse des vols, et on ne compte plus le nombre de vitres cassées. Et si vous sortez le soir, il vaut mieux rentrer avant dix heures. Bon, il n'y a pas vraiment de danger, mais c'est préférable".
Cette litote prudente a tout pour inquiéter. Une virée dans la cité nous instruit. Pas grand chose à voir avec Frisco : peu de commerces, pas de touristes. Nous devons être les seuls, en tout cas les seuls à oser mettre le nez dehors. Les rares magasins drainent une clientèle déclassée, des hommes en haillons, des familles avec femmes en voile intégral, et partout une crasse qui fait croire que le ramassage des ordures n'a pas cours. Un type, en pleine rue, beugle je ne sais quoi. Je me demande un instant s'il parle au téléphone mains-libres, mais non, il n'a pas d'oreillette - ou alors si discrète qu'elle est invisible. Il est vrai que je ne suis pas allé voir de près. On se dirige vers l'autoroute : sur la bretelle d'accès, la voiture doit se frayer un chemin précautionneux entre immondices et tentes d' homeless dressées à même la chaussée.
Jack London Square
Seul coin fréquentable - mais, du coup, vraiment trop sélect pour être honnête - est le Jack London Square, une marina aménagée caressée par le vent marin. Là, au clair de lune, l'on médite sur la condition du peuple de l'abîme.
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