12 mai 2018
Il fait un temps splendide ce matin. Le ciel est parfaitement dégagé ce qui est idéal pour monter au sommet de Beinn Alligin.
Je demande à la gardienne de la bunkhouse s’il reste un lit pour ce soir. Elle me répond entre deux chantonnements et ce n’est malheureusement pas le cas. Du coup, je me demande à voix haute si ce ne serait pas l’occasion de réaliser là-haut mon traditionnel bivouac de fin de séjour.
L’idée lui parait « lovely » !
Pas question de commencer l’ascension avant le début de l’après-midi. Je prends la route du sud pour quelques clichés de repérage sur le trajet qui m’attend et que l’on peut voir presque intégralement sur les clichés suivants qui permettent de découvrir, au-dessus du loch, l’ensemble du massif de Beinn Alligin.
Puis je gagne le petit village côtier de Shieldaig, à quelques miles au sud. Il y a une minuscule épicerie dans laquelle je me ravitaille pour les 24 heures à venir. Sandwiches, fruits, yaourts, barres énergétiques... De quoi monter l’esprit tranquille.
Je ne m’attarde pas car une course cycliste se prépare et je ne veux pas prendre le risque de me retrouver bloqué dans le bourg.
De retour à Torridon, je me restaure dans l’unique boutique/café/snack/coiffeur/postier/dentiste du village. Je choisis les « toasties », des sandwiches de pain de mie chauds, garnis de jambon, fromage et tomates. Simple et bon. Chez les British, faut pas prendre de risque, faut faire simple.
Tout cela m’amène aux alentours de midi. Je me rends donc sur le parking d’accès à Beinn Alligin, déjà bien rempli. Le temps de préparer mon sac – toujours trop lourd, et je me mets en marche.
Ça grimpe quasiment tout de suite et le sac ne facilite pas les choses. La première demi-heure me met déjà à rude épreuve.
Il y a une courte zone plus facile avant d’entrer dans le couloir qui permet de grimper entre les deux montagnes. D’ici, on distingue à la fois le couloir à gauche, et le sommet de Sgurr Mhor, à droite, qui constitue le point le plus élevé de mon périple.
Le couloir se divise en deux parties, l’une très raide et l’autre très très raide. On longe tout du long un minuscule ruisseau dont le son offre un petit réconfort psychologique. C’est la partie la plus longue et c’est vrai qu’elle parait interminable.
Le couloir débouche sur une sorte de faux plateau qui mène rapidement au premier sommet de la randonnée, « Tom Na Gruagaich ». 932 mètres. C’est l’occasion d’une pause bien méritée. Le point de vue est superlatif mais bizarrement assez peu photogénique. Trop large, trop vaste.
Pour continuer, il faut commencer par redescendre de l’autre côté, le long de la crête. Le début du sentier est assez compliqué à dénicher. C’est étroit et raide et certains passages se révèlent carrément dangereux lorsque vous portez un sac lourd susceptible de vous déséquilibrer. Faites gaffe si vous passez par là.
Un quart d’heure de descente, puis un second passé à suivre le chemin de crête qui mène à l’ascension du second sommet de Beinn Alligin : Sgrurr Mhor, 986 mètres. Un nom digne de la Terre du Milieu...
C’est aux abords de ce chemin de crête qui je compte planter ma tente. Inutile donc de balader mon sac avec moi pour monter à Sgurr Mhor. Je le planque dans un trou près du sentier et je me lance dans la dernière ascension.
Une petite demi-heure pour la boucler. Ça va beaucoup mieux sans poids supplémentaire sur les épaules. Rien à voir.
De là-haut, on se sent un peu sur le toit du monde. A l’ouest l’ile de
Skye, à lest le massif du Liathach.
Légèrement en contrebas le sentier se poursuit vers les cornes d’Alligin que j’envisageais d’emprunter sur le chemin du retour. Quelques randonneurs en remontent d'ailleurs.
Il serait complètement complètement déraisonnable de s'y engager avec un sac aussi lourd. Ce sera donc un retour par le même chemin, même si cela implique de gravir le sentier qui redescend du Tom Na Gruanaich. Mais nous y repenserons demain matin. En attendant, profitons plutôt du paysage fantastique qui se déploie devant nos yeux et laissons le soleil se pencher un peu vers l’horizon.
Je réfléchis au point idéal pour saisir le coucher du soleil. J’avais tout d’abord songé à rester ici, mais je me remémore une immense photo saisissante affichée dans le grand salon de la bunkhouse. Elle a été prise de l’autre côté, sur la pente de Tom Na Gruanaich. J’opte pour cette solution qui me permettra de bouger un peu.
Je redescends donc, parcours une nouvelle fois le chemin de crête entre les deux sommets, puis remonte légèrement de l’autre côté. J’essaye de retrouver l’endroit d’où était prise cette photo sans y parvenir. Je finis par me fixer et j’attends que les cimes du Liathach se mettent à rougeoyer.
Je me dis que j’aurais mieux fait de rester au sommet de Sgrurr Mhor. Mauvais choix. Ça arrive. Ne boudons cependant pas notre plaisir devant cette fin de journée qui s’accommode idéalement avec la guitare de Mark Knopfler.
Pour finir, je retrouve mon sac et installe ma tente devant un ciel flamboyant. Je suis claqué.
13 mai 2018.
J’ai eu froid cette nuit.
Au sortir de la tente, vers les 5 heures, le ciel est bouché. Il n’y aura pas de lever de soleil pour éclairer mon objectif.
Du coup je remballe à toute vitesse avant de prendre le chemin du retour. Je n’ai pas récupéré. Je me sens déjà épuisé. Je sens que le retour va être laborieux.
La remontée vers Tom Na Gruanaich est compliquée mais se déroule sans réel problème. Juste un peu de confusion sur la fin du sentier.
La descente du couloir est aussi interminable qu’à l’aller. Le poids du sac oblige à forcer sans cesse sur les genoux pour ne pas se laisser entraîner vers l’avant.
De retour au parking, je croise un large groupe de gens en partance pour le sommet. Je les reconnais. Ils logeaient à la bunkhouse en même temps que moi. Ils me demandent quelques conseils que je leur concède bien volontiers.
Je rêve d’un petit déjeuner complet. C’est au Torridon Inn que je vais le trouver. C’est un hôtel somptueux situé dans l’anse du Loch, à quelques kilomètres du village. Je crains que mon allure ne me barre la porte mais une pancarte me rassure dès l’entrée : « Bienvenue aux chaussures crottées ! », clame-t-elle. L’endroit est pourtant très classe et je le tarif finalement très raisonnable.
C’est ensuite la longue route vers
Glasgow sous un soleil de retour. De passage aux abords d’Eileen Donan Castle, je me gare avant de m’accorder une longue sieste sur l’une des pelouses qui bordent le parking.
Seconde partie du trajet à travers la magnifique route 87 qui ramène vers Invergary et dont j’avais raté l’embranchement en 2017. Il y a encore de la neige plein les sommets. C’est rude et sauvage. On se croirait en
Alaska.
Descente vers Fort Williams et retour à
Glencoe. Là encore, beaucoup de neige. Rien à voir avec l’année dernière. Mes plans prévoyaient d’aller bivouaquer sur Stob Beinn a'Chrulaiste pour saisir le lever du soleil sur
Glencoe, mais je sens que j’en ai assez fait pour cette année. Une pointe de regret cependant. Que cet endroit est beau...
Pour une autre fois, sans doute. Je n’ai aucun doute sur le fait que je reviendrai dans les
Highlands un jour ou l’autre. En attendant, le Premier Inn de Dumbarton m’attend pour ma dernière nuit en
Ecosse.
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