C'est quoi un cadeau ? C'est
un don.
Or, on le sait, et le sociologue
Marcel Mauss l'a expliqué en détails dans ses ouvrages, tout don exige
un contre don.
Noël le montre typiquement : on s'offre des cadeaux les uns aux autres. Si vous n'offrez rien à ceux qui vous couvrent de cadeaux, vous pouvez être sûr qu'il y a un moment où ils vont arrêter de vous en offrir ! Le contre don, c'est cela. Mais c'est aussi le sourire qu'on donne à l'autre,
le remerciement qu'on lui fait. Or, ça, on est censé l'avoir intégré depuis un bon nombre d'années : " dis merci à la dame ", c'est un b.a-ba de l'éducation. Sauf que, pour certains, malgré tout, ce remerciement là reste un défi.
Pourquoi ? Par manque d'éducation, de politesse ?Ou bien par honte, par pudeur. Pour remercier, et pour recevoir facilement un cadeau, encore faut-il être en mesure de montrer que l'on éprouve du plaisir. Et cette démarche peut être, pour certaines personnes, très intime, donc très délicate, parce que bloquée par la honte ou la pudeur. C'est une question de tempérament introverti, peut-être parce qu'on n'a pas grandi dans un milieu qui favorisait l'expression de son ressenti, de ses émotions. En tout cas, il y a évidemment quelque chose qui se joue dans la relation à l'autre, le cadeau fait lien ; il est le symbole d'une amitié, d'un amour, d'une affection - et cette dimension affective de la relation n'est pas vécue aussi simplement par tous.
Ca veut dire qu'on ne veut pas de ce lien là ? On rejette l'autre ?Non, plutôt qu'on rejette cette forme de lien. Parce que sous ses beaux emballages, le cadeau est une sorte de contrat social, relationnel. Et donc il peut être vécu comme une atteinte à la liberté, à l'indépendance chez ceux qui fuient toute forme d'engagement.
Est-ce que ce n'est pas aussi un manque de générosité ?Si, c'est vrai que c'est souvent ressenti de cette façon là par l'autre, par celui qui offre, car effectivement la générosité marche aussi dans ce sens : savoir recevoir un cadeau suppose de faire de la place à l'autre, de le prendre en compte,
ne serait-ce, déjà, que de prendre en compte l'effort, le temps qu'il a pris pour dénicher ce cadeau.
Et d'ailleurs, généralement ceux qui n'aiment pas recevoir de cadeaux n'aiment pas en faire non plus.
Preuve que c'est le même mouvement.