Ce qui se déroule à la centrale nucléaire de
Fukushima depuis deux semaines est d’une gravité exceptionnelle et il est normal que ça suscite les plus vives inquiétudes. Les réticences à fournir des informations fiables de l’opérateur Tepco, du gouvernement et de la bureaucratie d’état japonaise, et même semble-t-il des autorités américaines, n’arrangent rien.
Il n’est pas facile d’y voir clair en raison du caractère atypique de cet accident et il y a beaucoup de confusions dans ce que diffusent les médias et par conséquent dans ce que perçoivent les populations.
Il convient tout d’abord de distinguer irradiation et contamination. Sont irradiées les personnes qui sont directement exposées à une source radioactive. C’est le cas actuellement de ceux qui interviennent au sein de la centrale japonaise, là où des sources radioactives ne sont plus confinées. C’était le cas des milliers de « liquidateurs » à Tchernobyl il y a 25 ans. Et c’est aussi le cas des ouvriers et techniciens qui assurent l’entretien de toutes les centrales nucléaires, certains employés par des agences d’intérim ou des sous traitants, avec parfois des « astuces » pour contourner les durées d’exposition tolérables.
La contamination c’est la dissémination dans l’environnement de résidus radioactifs, gaz, particules, cendres et poussières, essentiellement par voie atmosphérique, le fameux nuage radioactif, mais avec évidemment des dépôts au sol qui vont prolonger la contamination le long de la chaîne alimentaire.
Le terme « nuage », en référence à Tchernobyl, est tout à fait trompeur. A Tchernobyl il y a eu une explosion qui a produit un vaste nuage de particules dont on a pu suivre la progression et la dispersion au gré de la circulation atmosphérique. Pour
Fukushima il faudrait plutôt parler d’un flux radioactif où se combinent les émissions en continu provenant des réacteurs et des piscines à l’air libre, et des bouffées lors des explosions, incendies et dégazages. L’évolution dans l’espace et dans le temps de cette contamination est donc beaucoup plus complexe.
La contamination de l’atmosphère est facile à contrôler en temps réel et les résultats en
France, notamment ceux de la CRIIRAD, organisme indépendant, indiquent que pour l’instant il n’y a rien à craindre. Ca ne veut rien dire pour la suite, car ce n’est en rien un nuage qui passe, ce qui veut dire que les contrôles doivent se poursuivre.
Pour les retombées au sol, qui affectent la terre, les plantes et les animaux qui les consomment, ainsi que les cours d’eau, les mers, les algues et les poissons, il y a un effet cumulatif sur lequel on n’insiste pas suffisamment. C’est cet effet cumulatif qui explique que les légumes produits dans la région de
Tokyo, à 250 km de
Fukushima, sont désormais contaminés, ainsi que l’eau courante, et cette extension géographique ne peut que s’étendre tant que tout n’est pas revenu à la normale à
Fukushima.
Ceci doit donc amener une surveillance à long terme des produits alimentaires, non seulement au
Japon, mais aussi dans toutes les zones affectées, surtout si cette situation se prolonge encore plusieurs semaines.
L’apparente stabilisation n’est donc en rien rassurante. La déclaration du 1er ministre japonais « nous travaillons à ce que la situation n’empire pas » est absurde car la contamination empire de jour en jour, sans compter que le risque d’un nouvel accident grave n’est pas écarté
Ajouté le 28 mars 2011 à 10h11 sans commentaire.....